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Gérard Davet: "Oui, certains juges ont envie de se payer Nicolas Sarkozy"

Gérard Davet, journaliste au Monde, ce mercredi dans Carrément Brunet sur RMC.

Gérard Davet, journaliste au Monde, ce mercredi dans Carrément Brunet sur RMC. - RMC

Le journaliste d'investigation du journal Le Monde, invité d'Éric Brunet ce mercredi sur RMC, a expliqué pourquoi, selon lui, Nicolas Sarkozy était aussi souvent inquiété par la justice, et pas François Hollande.

Non, décidément, Nicolas Sarkozy, mis en examen mardi soir pour "financement illégal" de sa campagne présidentielle de 2012, n'est pas traité comme les autres. C'est en tout cas ce que pense Éric Brunet, qui trouve que les juges et les journalistes d'investigation ne sont pas aussi prompts à enquêter sur l'actuel président, François Hollande. Sur le banc des accusés ce mercredi, face au procureur Brunet, Gérard Davet, journaliste d'investigation du journal Le Monde, qui a largement enquêté sur Nicolas Sarkozy. Alors, y a-t-il une différence de traitement envers l'ancien président ?

"Ils n'inventent pas les faits sur lesquels ils enquêtent"

"C'est une vérité, certains juges ont envie de se payer Nicolas Sarkozy", reconnaît Gérard Davet, pour qui l'ancien président "bénéficie d'un effet de notoriété et d'agressivité lié à sa personnalité".

"C'est quelqu'un de clivant et il déclenche donc l'hostilité des uns et des autres. La deuxième chose, c'est qu'il a été extrêmement agressif à l'égard des juges d'instruction, qu'il a traités de 'petits pois' et qu'il a voulu supprimer. Conclusion, je pense que certains juges effectivement ont envie de l'avoir dans leur bureau".

Pour autant, "ils n'inventent pas les faits sur lesquels ils enquêtent", note le journaliste, qui estime que l'ancien président aurait de toute façon été convoqué et mis en examen dans cette affaire, "pour une raison très simple: c'est que dans le dossier Bygmalion, il a signé des comptes de campagne qui sont faux".

"L'affaire AWF Musique ? La justice va s'y intéresser"

Mais si Nicolas Sarkozy a son affaire Bygmalion, François Hollande a son affaire AWF Musique, rétorque Éric Brunet, qui trouve qu'on ne parle pas suffisamment de cette affaire qui selon lui, pourrait être compromettante pour l'actuel pensionnaire de l'Élysée. "Cette histoire n'a rien à voir avec Bygmalion", estime Gérard Davet. Il explique : "D'abord il n'y a pas de surfacturation. Cette boite (AWF Musique), qui appartient au frère de Kader Arif, l'ancien secrétaire d'État aux Anciens combattants, s'occupe de prestations évènementielles. Elle a travaillé en 2011 avec le candidat Hollande à la primaire et un tout petit peu pendant sa campagne présidentielle. Ses prestations n'étaient pas à la hauteur, donc le contrat s'est arrêté. Le compte du micro parti de Hollande a versé 550.000 euros. Et ensuite, et la justice va enquêter dessus, il y a eu 85.000 euros versés par le Parti socialiste à AWF pour terminer le contrat en cours. Mais cette somme n'a pas été versée dans les comptes de campagne de François Hollande".

Mais pourquoi n'y a-t-il pas d'enquête journalistique là-dessus, interroge Eric Brunet ? Là encore, le journaliste se défend. "Non seulement nous avons fait les articles dessus dans Le Monde, mais l'enquête a été ouverte en décembre 2015, il y a à peine deux mois. Faites-moi confiance, (la justice) va s'y intéresser".

Gérard Davet rejette d'ailleurs les accusations de parti pris : "On a révélé l'affaire Jouyet – Fillon qui a bien emmerdé l'Élysée, rappelle-t-il. On a révélé l'enquête préliminaire qui a trait aux emplois fictifs liés à Claude Bartolone (président de l'Assemblée nationale).

"Contrairement à Sarkozy, Hollande et Valls ne sont pas des hommes d'argent"

Si aussi peu d'affaires sortent à propos de l'exécutif (hors affaires Cahuzac ou Thévenoud ou Morelle), c'est, selon le journaliste du Monde, "parce qu'il se trouve qu'Hollande et Valls sont tout sauf des hommes d'argent, du coup il n'y a pas d'affaires liées à eux. Je ne dis pas que c'est pour cela que Nicolas Sarkozy a la justice aux fesses, ce que je dis c'est que c'est un homme d'argent. Dans l'affaire Bygmalion, je pense que comme souvent, ce sont les hommes qui travaillent pour lui qui, pour lui complaire, font des choses qui sont parfois en dehors de la loi".

Surtout, "du côté de Nicolas Sarkozy il y avait un système. On a fait le compte, il y a 32 personnes proches de l'ex-chef de l'État qui sont poursuivis, condamnées ou inquiétés par la justice. 32 personnes ! Dont son directeur de cabinet, Claude Guéant, qui a, lui, été condamné".

Gérard Davet, qui ne désespère pas, toutefois, de trouver un jour de quoi écrire sur François Hollande. "C'est toujours après le règne qu'on finit par trouver quelque chose. Peut-être qu'on trouvera quelque chose sur Hollande" quand il aura quitter l'Élysée. "Je vous garantis qu'avec mes confrères, on cherche tous azimuts dans tous les domaines et de tous les côtés. (…) Je n'y peux rien, mais aujourd'hui on n'a pas trouvé de système politique clanique, clientéliste ou corrompue dans l'entourage du pouvoir en place. Le Figaro non plus n'a rien trouvé", s'amuse le journaliste.