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Dammartin-en-Goële: "Je ne voulais pas vivre ça"

A Dammartin, les habitants sont encore apeurés

A Dammartin, les habitants sont encore apeurés - AFP

Près de 10.000 personnes ont défilé dimanche à Dammartin-en-Goële, une ville qui ne compte habituellement que 8 000 habitants. Une mobilisation à la hauteur de l'évènement, qui a secoué vendredi, cette bourgade tranquille de Seine-et-Marne, théâtre du retranchement des frères Kouachi avant d'être tués. RMC s'est rendue sur place. Reportage.

Commerces fermés, volets clos, écoliers confinés puis évacués, forces de l'ordre sur les dents... Ce vendredi, Dammartin-en-Goële, petite bourgade de 8 000 âmes en Seine-et-Marne, ressemblait à une ville-fantôme. Pendant neuf heures, cette ville a en effet vécue en état de siège et dans l'angoisse, quand les deux frères Kouachi se sont retranchés dans une imprimerie de la petite zone industrielle. Des centaines de membres des forces de l'ordre ont bouclé la ville, ordonné aux riverains de rester chez eux, évacué des écoles, avant que les deux frères ne soient finalement tués.

Ce vendredi-là, Cathy, qui travaille dans une entreprise à quelques mètres de cette fameuse imprimerie, a passé la journée confinée dans son bureau, apeurée. Trois jours après les faits, l'anxiété demeure comme elle en témoigne à RMC. "Je suis complètement au fond… J'ai peur du monde, peur de tout… J'ai refusé d'aller en cours ce week-end parce que je ne veux pas aller dans les lieux publics. Je ne regarde plus les infos car ce que j'y vois me fait peur…"

"J'ai une boule au ventre"

Il faut dire que vendredi, elle a vécu "les neufs heures les pires de sa vie" : "Quand ils ont lancé l'assaut, là on a eu vraiment très peur. Ce sont des scènes de guerre, on se jette par terre, les murs tremblent…" Autant de souvenirs douloureux qui, malheureusement, resteront à jamais: "Je ne sais pas si je suis capable de retourner là-bas. J'ai peur. J'ai une boule au ventre rien que de penser qu'il va falloir y aller. On n'oubliera jamais ce qu'il nous est arrivés, ce qu'il s'est passé". D'autant plus fâcheux que Cathy l'assure: "Je ne voulais pas vivre ça".

Si, ce dimanche, près de 10 000 personnes ont défilé à Dammartin-en-Goële, du "jamais vu" dans cette petite ville qui compte habituellement 8 000 habitants, comme Cathy, ils sont nombreux à être encore sous le choc. C'est le cas de Chloé, une petite fille qui affirme: "D'habitude, j'ai toujours peur pour les autres mais là c'est la première fois que j'avais peur pour moi, peur de me prendre une balle…"

"Cela prendra du temps de se remettre"

Un autre habitant témoigne: "Nous, on est habitué au bruit des fusils de chasse dans la forêt et là on a vu des hélicoptères de l'armée débarqués, des membres du GIGN, du GIPN. C'était hallucinant…" Il en est persuadé: "Je pense qu'on n'a pas encore bien réalisé et que cela prendra du temps de se remettre de ça".

Evelyne vit en face de l'imprimerie et elle aussi ne s'est pas encore remise de cette terrible journée. "Les deux choses qui me resteront à l'esprit, et qui m'empêchent encore de dormir, c'est de voir cet hélico avec ces personnes en armes au-dessus de ma tête. Vous avez l'impression qu'on va vous tirer dessus, c'est infernal. Mais aussi d'entendre ce bruit, ces deux explosions qui ont fait trembler la maison. Je pense que tout ça restera longtemps dans ma mémoire". A noter que pour aider les habitants à tourner la page, le maire a mis en place une cellule psychologique. Evelyne ira certainement, dès ce lundi.

Maxime Ricard avec Marie Regnier