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"La vie n'est pas rose en ce moment": les Français consomment de plus en plus des produits plaisirs

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Les Français consomment de plus en plus de produits plaisirs, dits "doudous", selon une étude publiée par Kantar Worldpanel. Notamment des produits sucrés, comme le chocolat. Rien d'étonnant selon Pascale Hébel, spécialiste de la consommation, qui pointe une actualité "où tout est un peu incertain".

Chocolat, chips, pâte à tartiner, crackers... Les Français mangent de plus en plus souvent des produits plaisirs pour lutter contre la morosité. C'est ce qui ressort d'une étude Kantar Worldpanel publiée en début d'année.

L'an dernier, les ventes en volumes de crackers ont ainsi bondi de 29%, celles des barres chocolatées de 8%, +5% pour les pâtes à tartiner ou encore +4% pour la crème de marron et les chips. Le tout alors que les ventes moyennes de produits de grande consommation sont à l'inverse en recul de 0,9% en 2024. Au rayon alcool, les ventes de punch ont bondi de 39%, celles de téquila de 24% et celles de gin de 19%.

Produits "doudous"

Pour la spécialiste de la consommation, et directrice associée de C-Ways Pascale Hébel, "il y a cette envie de se faire plaisir, de se tourner vers des produits doudous", explique-t-elle ce mercredi sur RMC. Et cela s'explique par un contexte "où tout est un peu incertain". Selon elle, ce phénomène s'est développé en 2024, dans un contexte d'hyperinflation.

"À Noël, on a craqué sur les repas de fin d'année où on s’est fait plaisir, avec une hausse de consommation de foie gras, de vins qui pétillent. Ce sont comme les moments post-covid, où on a eu envie de se retrouver, se faire plaisir gustativement, partager des moments avec les autres. Et l’alimentation permet ça", détaille Pascale Hébel au micro d'Apolline Matin.

"Des moments de consommation autour du partage"

Le moment choisi pour manger change également, dit-elle. Les consommateurs ont plutôt tendance à se tourner vers des "produits consommés en dehors des repas". Selon l'étude, le volume global consacré à l’alimentation a nettement baissé. Mais proportionnellement, ces aliments plaisirs sont, eux, en hausse. Et la spécialiste décortique: "Ceux qui ont le plus de croissance, ce sont les biscuits salés, pour les moments d'apéritif."

"Pendant le Covid, on faisait des apéritifs sur Whatsapp, donc après on a voulu les mettre en pratique. Les moments où on s'invite avec les voisins, où on voit des amis, des moments de consommation autour du partage". Par conséquent, "on mange moins pendant les déjeuners et les dîners, on va plutôt aller vers ces partages au bureau, le matin à 10h, l’après-midi".

Les fruits et légumes ont de moins en moins la cote
Les fruits et légumes ont de moins en moins la cote
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Et ce n'est pas tout, les activités plaisirs sont également en hausse. "Tous les loisirs d'une journée prennent de l'ampleur. On a envie d’avoir des moments d'exception, en dehors du quotidien, de décrocher", détaille Pascale Hébel.

"Ce qu’on assimile le plus au plaisir de consommer, ce sont les vacances et les moments de loisirs", selon la directrice associée de C-Ways, une société de conseil spécialisée en data sciences. Alors, le service augmente, on achète moins de produits, donc les produits industriels sont en baisse. Par exemple, on consomme "du streaming, des loisirs".

Des plaisirs sans excès

Mais surtout, pas de culpabilité! "On peut associer santé et plaisir! Avant c'était l'un ou l'autre, mais aujourd'hui, on arrive à associer les deux". "Ce n'est pas parce qu’on va manger un petit bout de chocolat qu’on n’a pas une alimentation saine", rassure la spécialiste de la consommation. Comme elle l'explique, "vous avez une offre qui promet d’apporter des fibres, et le plaisir du magnésium du chocolat".

Pour Christophe, qui ressort d'un magasin avec un paquet de gâteaux, pas de doute: "Ca revigore, quand on a un petit souci, quand on est stressé". Stressé notamment par une actualité anxiogène. "L'actualité politique, économique, la vie n'est pas rose en ce moment", constate-il au micro de RMC.

Inflation, guerre en Ukraine...

"Ma femme s'en plaint, elle me reproche mes petits kilos en plus", reconnaît Christophe. Philippe avoue aussi craquer davantage, déprimé par la guerre en Ukraine ou encore: "l'inflation". "Quand je vais faire mes courses, et vois mon panier qui est de 100 euros au lieu de 80-70 euros, bon..."

Pour Gervaise, ça permet de lutter contre la déprime: "J'ai lu que le chocolat augmentait la sécrétion de sérotonine ou de dopamine". "Je trouve que ça marche plutôt bien", affirme-t-elle.

Et cette hausse des produits dits réconfortants dure depuis plusieurs années, explique Nicolas Léger, du cabinet d'analyse Nielsen IQ: "Avec l'inflation en grande distribution, les ventes alimentaires sont plutôt stables. Mais il y a des catégories de produits qui vont bien, toutes ces catégories de plaisirs à la fois sur du salé et du sucré". À l'image des tablettes de chocolat, ajoute-t-il. En 2024, les Français en ont acheté 24 millions de plus.

SG avec Lucas Nitzsche et Solène Gardré