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Économie

Les intentions d'embauche ont chuté de 12,5% en un an: "ça peut faire beaucoup de dégâts"

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Les intentions d'embauche ont chuté de 12,5% en un an, selon le baromètre annuel des besoins en main-d’œuvre dévoilé ce vendredi par France Travail. Un signal inquiétant selon Bernard Cohen-Hadad, président de la CPME Île-de-France.

Encore un mauvais signal pour l'économie française. Selon le baromètre annuel des besoins en main-d’œuvre de France Travail, les intentions d'embauche ont chuté de 12,5% en un an, par rapport à 2024. Seule une vingtaine de métiers sur 217 font figure d'exception, notamment dans la santé avec +4,9% d'intentions d'embauche pour les infirmiers et les sages-femmes, et +3,9% pour les aides-soignants.

En 2025, seulement 24,1 % des établissements prévoient d'embaucher, contre 28,2 % en 2024. Cette année, les entreprises cumulent 2,43 millions de projets d'embauche. En 2022 et 2023, ce chiffre avait dépassé les 3 millions, avant de descendre à 2,78 millions en 2024.

350.000 projets d'embauche en moins

La dynamique du marché de l'emploi semble bel et bien cassée avec 350.000 projets d'embauche en moins par rapport à l'année dernière. Certains métiers continuent à être recherchés, surtout dans la restauration, mais la situation se dégrade dans toutes les régions et dans quasi tous les secteurs d'activité. En particulier dans la construction et le textile où les employeurs ne veulent pas se risquer à recruter dans un contexte très incertain. "Tous les secteurs sont concernés, particulièrement ceux en tension comme la bâtiment, la construction, l'hôtellerie-restauration, les services à la personne, la sécurité, mais aussi l'automobile et le commerce, et tout ce qui est du service", confirme Bernard Cohen-Hadad, président de la CPME Île-de-France, au micro d'Anaïs Matin.

A vous de nous dire : Les intentions de recrutements au sein des entreprises en France sont en baisse de 12,5% par rapport à 2024 - 12/04
A vous de nous dire : Les intentions de recrutements au sein des entreprises en France sont en baisse de 12,5% par rapport à 2024 - 12/04
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Problème de confiance

Selon lui, "il y a un problème de confiance à l'international et forcément un problème de confiance chez les patrons qui n'aiment pas l'instabilité politique et économique". Et c'est une mauvaise nouvelle pour le taux de chômage dans les mois à venir car, jusqu'à présent, les embauches limitaient la casse, c'est-à-dire qu'elles compensaient, au moins en partie, les fermetures d'usines.

Le constat est d'autant plus inquiétant que cette enquête publiée vendredi a été réalisée en fin d'année dernière, donc avant le déclenchement de la guerre commerciale par Donald Trump, qui risque d'entraîner une baisse d'activité en Europe. "On a eu sur le dernier semestre 2024 une certaine perturbation économique, avec des gouvernements relativement instables, une absence de gouvernement, la crise en Ukraine qui est toujours là et une inquiétude liée à l'élection de Trump en novembre", détaille le spécialiste.

"On a une inquiétude, un moral des patrons qui est relativement en berne parce qu'ils ne peuvent pas se projeter dans la durée, avec pourtant une attente d'embauche, puisqu'aujourd'hui 41% de nos petits entrepreneurs recherchent des compétences".

66.000 défaillances annuelles

En conséquence, le taux de défaillances "a explosé", dit-il. "Il a doublé par rapport à la fin de la période du Covid-19, on était à 35.000 défaillances annuelles, aujourd'hui on est à plus de 66.000". Rien qu'au premier trimestre 2025, 17.000 procédures collectives ont été ouvertes, en hausse de 4.4% sur un an. "Ce qui est extrêmement grave c'est que ce ne sont pas des petites entreprises, ce sont des moyennes entreprises, le segment le plus touché actuellement c'est entre 50 et 100 salariés.

"Ça peut faire beaucoup de dégâts à la fois sociaux, humains et au niveau de l'économie locale ou régionale", détaille-t-il.

"Il y a un vrai enjeu aujourd'hui de stabilisation, de confiance, de simplification d'un certain nombre de procédures et de stabilité économique et politique", explique Bernard Cohen-Hadad. Malgré tout, les patrons ne baissent pas les bras: "Nous avons encore de l'espoir". Ce qu'ils demandent, c'est un "soutien" mais "pas uniquement financier". Un soutien "politique dans la durée", ainsi qu'une "politique économique claire, un gouvernement qui reste dans la durée et puis des élus et une Europe qui reste extrêmement offensive pour privilégier une réindustrialisation de l'Europe, renforcer nos économies et diminuer notre dépendance économique".

"Se recroqueviller sur son activité"

"C'est aussi un problème de formation. On a beaucoup de publics qui viennent dans une entreprise, former du personnel ça prend 6, 8 ou 12 mois et aujourd'hui dans nos entreprises, on n'a pas les moyens d'investir immédiatement dans des formations, si on a pas de visibilité à long terme sur le carnet de commandes c'est un peu dommage et puis si on veut désmicardiser nos emplois dans nos entreprises il faut aussi du temps et pouvoir monter en compétences".

Mais ces chiffres ne surprennent pas Marc Sanchez, secrétaire général du syndicat des indépendants et des TPE. Pour lui, "il y a deux facteurs nouveaux". "Le premier, c'est l'absence de visibilité qui est venue s'aggraver avec une conjoncture économique qui est toujours en constante dégradation, avec des chiffres d'affaires qui sont en baisse pour beaucoup de dirigeants de TPE" notamment dans le domaine "du commerce et de l'industrie", explique-t-il.

"Aujourd'hui on a plutôt tendance à se recroqueviller sur son activité", détaille Marc Sanchez.

Il poursuit: "Et pour le chef d'entreprise, à travailler plus, plutôt qu'effectivement engager une procédure de recrutement, même si parfois il pourrait estimer qu'il en avait le besoin". En 2025, "50,1% des projets d’embauches sont jugés difficiles par les employeurs", mais ce chiffre est en "diminution de 7,3 points par rapport à 2024".

SG avec Victor Joanin