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Les patrons du Cac 40 gagnent 130 fois plus que le salaire moyen: faut-il plafonner leur rémunération?

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Une nouvelle étude de l'association Oxfam montre que les grands patrons ont continué d'accentuer leur écart sur le salaire moyen en 2022.

La rémunération XXL du PDG de Stellantis Carlos Tavares avait déjà fait polémique il y a quelques semaines. Et une étude d'Oxfam vient remettre la question du salaire des grands patrons au centre du débat public. Les patrons du Cac 40 ont gagné en moyenne 130 fois plus que le salaire moyen dans leurs entreprises en 2022, un fossé qui se creuse depuis 2019 selon cette une étude publiée ce mardi 30 avril.

Oxfam s'inquiète ainsi de la "redistribution des richesses est inéquitable", alors que ces salaires augmentent d'environ 17% depuis 2019, indique l'association. En 1979, ces patrons "ne gagnaient en moyenne 'que' 40 fois plus que le Smic", précise-t-elle. En 2022, c'est en moyenne 6,66 millions d'euros, soit 27% de plus que trois ans auparavant. Les salariés ont de leur côté vu leurs salaires n'augmenter que de 9%.

Certaines entreprises "creusent davantage les inégalités" que d'autres. Teleperformance affiche "de loin" le plus grand écart de rémunération, affirme ainsi Oxfam, son PDG Daniel Julien ayant gagné 1.453 fois plus que le salaire moyen de son entreprise en 2022, avec ses 19,7 millions d'euros. Juste après arrive Carrefour, dont le PDG a gagné 426 fois plus, un écart qui s'explique "par un très faible salaire moyen", précise Oxfam.

"Que fait la puissance publique?"

Le patron de Stellantis Carlos Tavares ne figurait en 2022 "que" sur la troisième marche du podium des mauvais élèves, ses 22 millions d'euros représentant 341 fois plus que le salaire moyen chez le constructeur automobile. Un montant déjà jugé "choquant et excessif" par le président français Emmanuel Macron.

L'enseignant et syndicaliste Benjamin Amar, chroniqueur chez Estelle Midi sur RMC, estime que les gens sont choqués de ces chiffres, mais regrette que rien ne soit fait malgré les indignations permanentes à ce sujet. "Ce qui m'intéresse, c'est ce que fait la puissance publique. J'en ai assez de voir ce sujet revenir sans cesse et disparaître au gré de l'actualité", fulmine-t-il.

"Ce qui choque les gens, c'est de voir ces chiffres alors que eux ont eu des augmentations de salaires inférieures à l'inflation", juge-t-il.
Faut-il plafonner le salaire des patrons ? - 30/04
Faut-il plafonner le salaire des patrons ? - 30/04
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Faut-il un salaire maximum?

L'association Oxfam milite pour que la rémunération des dirigeants soit conditionnée à une stratégie climat articulée, à un salaire "décent" dans l'ensemble de l'entreprise et qu'elle soit moins liée aux critères financiers. Elle réclame surtout l'instauration d'un salaire maximum, qui représenterait 20 fois le salaire médian de l'entreprise. C'est à peu près l'ordre de grandeur qu'on trouvait en 2022 avec le salaire moyen chez Crédit Agricole (23) ou Orange (29). Une idée qui fait son chemin chez les députés de gauche, des socialistes aux insoumis, qui réfléchissent à des propositions de loi.

"Cela me paraît un peu compliqué (à mettre en place), il y a quand même la loi des marchés. D'autant qu'on n'est pas les pires en France par rapport à autres pays comme les USA", commente l'économiste Pascal de Lima dans Estelle Midi.

"C'est un sujet de conviction politique. Il y a des arguments pour la régulation. On peut se poser des questions, surtout s'il n'y a pas de résultats économiques pour l'entreprise. Il faut trouver une cohérence d'ensemble entre toutes les parties sans se mettre les uns contre les autres comme d'habitude", synthétise-t-il.

Du côté des entreprises visées, Teleperformance affirme que l'écart souligné par Oxfam entre dirigeant et salariés est "purement théorique et non réel". L'entreprise, contactée directement par l'ONG, souligne que la rémunération de son PDG incluait des "actions de performance", ce qui signifie que la "valeur retenue" n'est "pas celle que les bénéficiaires vont recevoir", en fonction des objectifs réalisés et de l'éventuelle "baisse du cours de bourse".

J.A. et AFP