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Économie

Mensonge ou déni: pourquoi y a-t-il un tel trou dans nos finances publiques?

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Le nouveau gouvernement est à la recherche de 60 milliards d'euros pour combler un déficit qui flambe. A quel moment les finances publiques ont-elles vraiment commencé à déraper?

Est-ce qu’on nous a menti sur l’état des finances publiques? La commission des finances de l’Assemblée nationale demande des comptes à Bruno Le Maire. Alors qu’on parle d’économies et de hausses d’impôts, on ne s’explique toujours pas l’explosion des déficits, même s’il semble de plus en plus clair qu’on a mis la poussière sous le tapis. Le député LFI Eric Coquerel veut transformer la commission des finances qu’il préside en "commission d’enquête sur le dérapage budgétaire".

La loi de finances pour l’année en cours tablait sur 4,4% de déficit. C’est le chiffre sur lequel on fonde le budget, les recettes moins les dépenses. La réalité dépassera sans doute les 6%. Si ça peut sembler dérisoire à première vue, c’est un dérapage à 50 milliards d’euros!

"Maquillage des comptes"

Les oppositions demandent donc des comptes, et demandent si la réalité de nos finances publiques a été cachée. Les recettes fiscales sont décevantes: TVA, cotisations salariales, impôt sur les sociétés… Tout est revu à la baisse. Mais est-ce qu’on s’est trompé ou est-ce qu’on nous a menti? Chez LR, on a parlé de "maquillage des comptes".

La matinale 100% info et auditeurs. Tous les matins, Apolline de Malherbe décrypte l'actualité du jour dans la bonne humeur, avec un journal toutes les demies-heures, Charles Magnien, le relais des auditeurs, Emmanuel Lechypre pour l'économie, et Matthieu Belliard pour ses explications quotidennes. L'humoriste Arnaud Demanche vient compléter la bande avec deux rendez-vous à 7h20 et 8h20.
Expliquez-nous par Matthieu Belliard : Dérapage budgétaire, y a-t-il eu déni ? - 14/10
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Pour le député PS Philippe Brun, vice-président de la commission des finances, avec qui nous avons échangé, il y a deux enjeux. D’abord le timing: cette commission d’enquête peut-elle se glisser entre aujourd’hui et le vote final du budget, histoire de ne pas voter n’importe quoi pour 2025? Deuxième enjeu, au-delà de la politique: interroger nos outils statistiques, comment a-t-on pu se tromper autant et ne pas voir le déficit se creuser?

Premières alertes internes fin 2023

Les premières alertes à Bercy surviennent à l’automne 2023. Mais on n’en saura rien dans l’immédiat. Il s’agit de notes confidentielles qui ont été ignorées. Jusqu’à une nouvelle alerte en février. C’est alors que Bruno Le Maire annonce 10 milliards d’économies. Mais là encore, Bercy continue d’annoncer des perspectives "optimistes" de déficit, alors que les comptes publics sont à la dérive.

"2024 est année noire pour les finances publiques, je pèse mes mots, mais je le dis", a lancé Pierre Moscovici, président de la Cour des comptes et du Haut conseil aux finances publiques.

Bruno Le Maire aurait plaidé pour un projet de loi de finances rectificative en mars, refusé par Matignon et par l’Elysée. Il faut dire que les européennes approchaient...

Le Figaro raconte un Bruno Le Maire inquiet au printemps... Les comptes publics, "ça n’intéresse pas beaucoup le président", tout en vantant son bilan. "Tout cela va s’effondrer sur les finances publiques", aurait-il prophétisé.

Cela dit, en partant, Bruno Le Maire promettait toujours 3% de déficit en 2027. Plus personne n’y croit. Nos taux d’emprunt ne se comparent plus à l’Allemagne mais à la Grèce. L’agence de notation Fitch a émis des perspectives négatives dans sa dernière notation ce week-end. Aujourd’hui, certains parlent déjà de bilan d’Emmanuel Macron.

Promesses d'équilibre en 2017

Au début du premier quinquennat Macron, les prévisions budgétaires envoyées à Bruxelles début 2018 promettaient un retour historique des comptes publics à l'équilibre à l'horizon 2022. Et depuis, on a connu des baisses d’impôts non financées tout en sortant le chéquier. On pense au Covid, mais même avant, avec la sortie de crise des "Gilets jaunes".

En conseil des ministres, début mars dernier. Emmanuel Macron mobilisait ses ministres pour les européennes: pas question d’annoncer de nouvelles économies. "S'il y a 12 points d’écart avec le RN, il n'y en a qu'un dont on est sûr qu'il reste autour de cette table jusqu'en 2027, c'est moi", disait-il.

C’est vrai que la plupart ne sont plus autour de la table. Bruno Le Maire enseigne l’économie en Suisse, et il n’a répondu que par sms à nos confrères de France Télévisions: "La vérité apparaîtra plus tard".

Matthieu Belliard (édité par J.A.)