"Pour 1€ je prends": ces commerçants qui continuent d'accepter les chèques malgré leur raréfaction

C'est bientôt la fin des chèques. Objet longtemps incontournable pour les paiements, le Trésor public envisage en tout cas de ne plus les accepter et de fermer le dernier centre de traitement du Trésor public en 2027. En 10 ans, leur utilisation a baissé de 72% et ne constitue aujourd'hui plus que 3% du nombre total de transactions en France, contre 37% en 2000.
Selon les informations du Monde, seuls 39 millions de chèques ont été encaissés en 2024 par le Trésor. Mais pour Jonathan, auditeur et chauffeur routier en Vendée, le carnet de chèque est un indispensable. Également commerçant et patron, il n'accepte pratiquement que les chèques dans son entreprise: "J’accepte aussi les virements mais clairement je préfère les chèques".
"Le chèque je le vois passer, alors qu’avec la carte bancaire il y a une commission et moi la banque j’ai pas envie qu’elle me prenne une commission là-dessus", explique-t-il sur RMC.
"Pas de chèque, pas de palette"
De plus, pour les virements "Ce n’est pas tout le temps instantané" donc il ne va pas forcément apparaître au moment du paiement. Tout est plus simple, selon lui, en passant par le chèque. Même en cas d'impayé: "Avec le chèque vu que j’ai la facture, s’il ne passe pas, je l’envoie aux huissiers. Le client va donc me régler ce qu’il me doit et en plus il paiera les huissiers". Mais il n'a, de toute façon, jamais eu de problème de fraude. Alors si vous vous rendez dans son commerce, il n'y a pas le choix: "s'il n’y a pas de chèque, il n’y a pas la palette". Simple et efficace.
Et cela confirme une tendance sous-jacente. La tendance lourde c’est qu’on utilise moins de chéquiers. Pour les banques, c’est un boulet le chèque. Donc elles ont mis une forte pression pour que les Français passent aux moyens de paiement digitaux. Mais cela a l'effet inverse, il y a une réaction récente où les Français se disent qu’ils veulent avoir le choix. Il y a donc paradoxalement un retour du chèque. Finalement, ce qu'on veut c’est juste avoir le choix entre des moyens de paiement digitaux ou physiques.
"Entre 2.500 et 3.000 euros de chèques impayés"
Depuis un an environ, plus de commerçants jouent finalement le jeu du chèque, ou plutôt son retour, et notamment à cause de ces frais imposés par les banques. Mais pour Jean-Claude, patron d’une station service 24h/24 à Perpignan, et auditeur de RMC, ces frais à la banque peuvent se négocier. Pour lui, "c’est quand même scandaleux qu’elles puissent prendre de l’argent là-dessus vu que tout est informatisé maintenant. Il n’y a plus de personnel derrière pour eux".
"Donc je ne comprends pas pourquoi nous payons des frais derrière, vu qu’en plus la carte est déjà payée par le client", s'indigne-t-il.
A sa station-service en tout cas, les chèques ne sont plus les bienvenus. Après 27 ans à tenir son entreprise, il a changé sa manière de fonctionner: "au début on prenait les chèques, sauf que ça me coûtait entre 2.500 et 3.000 euros de chèques impayés par an. Donc depuis 2014, on a arrêté de les prendre". Mais cela vient avec son lot de conséquences aussi: "il y a eu des gens qui partaient sans payer vu qu’il n’y avait plus les chèques. Donc là on tombait à 800 euros à peu près par an". A chaque problème sa solution: "c’est pré-paiement obligatoire maintenant, et paiement en espèce ou carte bleue seulement".
"Tous perdants"
Finalement Gérald, auditeur et boulanger en Haute-Garonne, ne les voit même plus passer ces chèques. Pourtant, "j'accepte les chèques même de 1euro ou de 30 centimes, je m’en fiche, ça fait juste marcher la banque. C’est eux que ça ennuie plus que moi".
Mais les clients ont changé d'habitudes: "On nous paye beaucoup moins en chèque depuis 20 ans. Il y a 15 ans on payait en espèce ou en chèque, peu de cartes, d’ailleurs je ne prenais même pas la carte bleue".
"Mais aujourd’hui, si on ne prend pas la carte, les gens repartent outrés, ils ne comprennent pas".
Pourtant, lui aussi préférerait recevoir des chèques: "la carte bleue je met un montant parce que je suis taxé dessus, mais les chèques je ne suis pas taxé quoi. C’est ça l’avantage mais les gens ne veulent pas comprendre".
"On est tous perdants avec la carte bleue car eux aussi paient des frais", développe le commerçant.
Et puis, les chèques en bois et les arnaques ne sont pas si communes. Lui-même le dit: "je n'ai eu qu'un chèque impayé de 26 euros en 18 ans de métier".