“Tout le monde va partir, c'est contre-productif !”: le retour de l’ISF, une bonne ou mauvaise idée?

"Justice, c’est le mot qui nous lie, nous toutes et tous ici. Nous ferons en sorte de financer ce projet très ambitieux en le prenant dans la poche de ceux qui ont les moyens. Nous appelons à un réarmement civique. En taxant les superprofits, en faisant en sorte que l’ISF soit rétabli, la flat tax abolie et l’exit tax rétablie", détaillait Olivier Faure, premier secrétaire du Parti Socialiste et député sortant de Seine-et-Marne, la semaine dernière. Alors, pour ou contre le retour de l’ISF? Les chroniqueurs d’Estelle Midi ont débattu ce mardi.
Un manque à gagner
En janvier 2018, cet impôt avait été remplacé à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), moment fort du premier quinquennat d’Emmanuel Macron. Le président de la République justifiait alors son action en précisant que “l'ISF coûte cher à nos entreprises et à notre économie et qu’il conduit des centaines de contribuables à s'expatrier chaque année”. Une justification contestée par les économistes. Ce qui est sûr, c'est qu’il y a eu un manque à gagner.
En 2017, 360.000 ménages étaient redevables de l’ISF. Un an plus tard, on ne comptait plus que 133.000 foyers devant acquitter l’IFI. Les recettes fiscales ont tout naturellement plongé: un manque à gagner de 4,5 milliards d’euros en 2022, selon France Stratégie, une institution qui dépend de Matignon. Selon elle, les recettes d’ISF auraient été égales à 6,3 milliards d’euros en 2022, alors que celles de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) ne sont que de 1,8 milliard d’euros.
Reste qu’en de nombreux endroits en Europe, l’ISF a été abandonnée. Les Pays-Bas, qui l'avaient instauré en 1894, l'ont supprimé en 2001. Avant, il y a eu l'Autriche en 1994, le Danemark en 1995, l'Allemagne et l'Irlande en 1997. La Finlande et la Suède y ont mis fin en 2006 et de 2007. Toutefois, tendance inversée en Norvège ou l’équivalent d’un ISF a été remis en place en 2021.
"Un message d'honnêteté citoyenne"
Mais des grands noms de l’économie comme Julia Cagé ou Thomas Piketty, proche du Nouveau Front Populaire, proposent la mise en place d’une nouvelle taxe sur les plus riches. “L’ISF services publics”, serait un impôt sur la fortune en vue de refinancer les services publics. Pour Thierry Moreau, "ce genre de message serait un message d'honnêteté citoyenne, de contribution à la chose commune de la part des plus riches !".
Anne-Sophie Simpere, militante associative, partage son avis: “c’est une mesure à la fois financièrement faisable et politiquement très souhaitable”.
“Le principal argument contre, c’est de dire que les gens vont parti si l’ISF fait son retour. Mais ce qu’il faut essayer de comprendre, c’est qu’il n’y a pas de fatalité, surtout si on met en place l’exit tax (une taxe susceptible de s'appliquer lorsqu'un contribuable français transfère son domicile fiscal hors de France), explique Anne-Laure Delatte, chercheuse en économie au CNRS, questionné dans Estelle Midi.
Mais Thomas, un auditeur, estime que le retour de l’ISf serait “une connerie”. “Tout le monde va partir, c'est contre-productif ! Il faut pouvoir développer son entreprise grâce à l'argent qu'on ne met pas dans l'ISF !".
Ludovic, un autre auditeur, va justement dans son sens: "Je vais être clair, si l'ISF revient, je me barre ! Je donne déjà 58% de ce que je gagne à l'État... quand je vois ce qu'ils en font, ce n'est pas la peine !".