"Ça empire": faut-il plafonner l’écart de salaires entre les patrons et les salariés?

Des écarts abyssaux... C'est ce que dénonce l'ONG Oxfam France à propos des rémunérations entre les dirigeants des grandes entreprises françaises et leurs salariés. En 2021, la rémunération d’un patron d’une grande entreprise française est presque 100 fois supérieure à celle de son salarié (x97). Autrement dit, le 7 janvier, le patron a déjà gagné ce qu’un employé n’aura qu’après une année complète de travail. L’ancienne ministre du Logement Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France, plaide pour un plafonnement de 1 à 20, entre le salaire médian et celui du patron.
"En dix ans, on est passé de 64 à 97, explique-t-elle dans ‘Apolline Matin’ ce vendredi sur RMC et RMC Story. On est sur une pente d’augmentation considérable, ça empire. Dans les années 80, les patrons n’étaient pas pauvres, et ça avait déjà fait scandale. L’écart dans les entreprises du Cac 40, c’était 40. L’écart s’accroit et on pense que ce n’est pas une bonne chose pour les entreprises, l’équilibre de la société et on doit pouvoir imaginer d’aller vers davantage de modération."
Mais ce plafonnement pourrait faire fuir les grands dirigeants. "Ça existe pour toutes les grandes entreprises publiques et on n’a pas de mal à trouver des super dirigeants pour ces grandes entreprises publiques, répond Cécile Duflot. Ça existe déjà. Ça fait l’équivalent de 500.000 euros par an, c’est un très, très gros salaire et ça permet de vivre très confortablement. Ce sont des gens qui ont une vraie responsabilité, beaucoup plus d’importance. On peut discuter de l’ampleur de cet écart mais ce qui est sûr, c’est que ça existe."
"Emmanuel Macron, je lui dis chiche"
Les entreprises risquent aussi d’être réfractaires. "C’est vrai que ce sont les actionnaires qui décident, mais dans un cadre légal, souligne l’ex-secrétaire nationale d’Europe Ecologie-Les Verts. Ils ne peuvent pas décider de dépecer l’entreprise au profit du dirigeant. Il y a des choses qui sont légales et d’autres qui ne le sont pas. Ce qu’on propose, c’est que devienne légal le fait qu’il ne puisse pas y avoir un écart délirant entre les salaires moyens d’une entreprise et le salaire du dirigeant. On ne dit pas que cette règle doit être la même dans toutes les entreprises. On propose que des négociations aient lieu par branche, par entreprise, pour que cet été soit respecté. Cet écart nous semble honnêtement assez large."
Cécile Duflot invite donc Emmanuel Macron à s’impliquer sur ce dossier, après qu’il a reconnu ce jeudi sur le marché de Dole (Jura) que certaines rémunérations pouvaient choquer mais qu’il n’a pas le pouvoir dans le secteur privé. "Ce qui est sûr, c’est qu’il ne peut pas répondre que c’est normal aux gens qui travaillent et qui gagnent des salaires qui n’ont rien à voir. Moi, je lui dis chiche, lance l’ancienne ministre. On a des propositions. Il y a déjà une proposition de loi qui a été déposée au Parlement, pour travailler à cette régulation de l’écart des salaires. Allons-y, faisons-le."