"De l'argent foutu en l'air": le gouvernement veut lutter contre les ruptures conventionnelles abusives

La ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet s'attaque aux ruptures conventionnelles. Le dispositif, créé en 2008, pourrait voir ses conditions durcies. La ministre a demandé aux partenaires sociaux de plancher sur la question car le gouvernement estime qu'il y a des "abus".
Ce dispositif permet à l'employeur et au salarié de rompre un CDI d'un commun accord. Cette séparation à l'amiable ne concerne que les personnes embauchées en CDI, et est depuis peu possible pour les fonctionnaires. Une procédure spécifique doit être respectée, selon la loi, avec la mise en place d'entretiens, le respect des délais de procédure, et une demande d'homologation par l'administration.
Une fois signée, la rupture conventionnellent entre l'employeur et le salarié prévoit une indemnité spécifique versée à l'employé, qui pourra également percevoir des indemnités de France Travail.
Un accord "gagnant-gagnant"
C'est un accord "gagnant gagnant", confie Cécile, qui a bénéficié de ce dispositif après 9 ans passés dans son entreprise de ressources humaines. "Je commençais à m'ennuyer et je n'adhérais plus forcément à la politique de l'entreprise", explique-t-elle.
"Pour moi, c'était une façon de partir plus sereinement, de toucher le chômage, éventuellement de faire une formation", ajoute Cécile.
Les ruptures conventionnelles arrangent aussi parfois les directions. Laurence, responsable dans une entreprise, vient d'en accorder une à une salarié. "Son conjoint a trouvé un travail dans une autre région. Nous, pendant qu'elle était en congé maternité, on l'avait remplacée. Ça arrangeait tout le monde", reconnaît Laurence, dont l'entreprise "ne voulait pas laisser la salariée partir pour rien".
Pour d'autres patrons, comme Philippe, cela peut tourner au bras de fer. "On a fait un refus à un salarié parce que lui, c'était pour rester chez lui, pas pour avoir un projet derrière. Moi je trouve que c'est de l'argent foutu en l'air", raconte-t-il.
Un coût estimé à 9,3 milliards d'euros
La ministre du Travail entend lutter contre ce qu'elle qualifie d'abus. Selon l'Unedic, le dispositif a coûté l'an dernier à l'État 9,3 milliards d'euros. Mais durcir le dispositif n'est pas la solution selon Benoit Serre, expert en ressources humaines: "Il y a toujours des gens qui abusent du système. En attendant, il faut être très prudent avec cet outil qui a permis quand même de se séparer de collaborateurs sans conflit."
"Si on touche un peu trop à ce dispositif, on va repartir sur des dispositifs plus conflictuels", craint Benoit Serre.
Les partenaires sociaux ont donc à charge de proposer une réforme de l'assurance chômage et du droit du travail au gouvernement.