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"Les pensions sont faibles": les limites de la retraite par capitalisation voulue par Edouard Philippe

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Candidat à la présidentielle, l'ancien Premier ministre Edouard Philippe souhaiterait instaurer une partie de retraite par capitalisation au système actuel, par répartition. Mais pour l'économiste Michaël Zemmour, cette capitalisation a l'oeuvre dans d'autres pays européens, à des conséquences très néfastes sur le niveau des pensions notamment

Et si la France passait à la retraite par capitalisation pour sauver ses finances? L'ancien Premier ministre Edouard Philippe, candidat proclamé à l'élection présidentielle de 2027, a émis l'idée d'introduire une part de capitalisation dans le système de retraite des Français.

"Il faut mettre en place un système de capitalisation qui n'a pas vocation à remplacer complètement la répartition, mais qui doit venir compléter le système de répartition", a assuré ce mercredi sur France Inter, le maire du Havre. "10, 15, 20%. En Allemagne, c'est environ 15%. Donc (en France) on peut aller plus loin. On peut arriver à mon avis à 15%", a-t-il ajouté.

Avec un système de retraite par répartition, ce sont les actifs qui paient les pensions des seniors en cotisant. Avec un système de retraite par capitalisation, les actifs financent leur propre retraite en plaçant leurs cotisations dans des fonds d'investissements.

Cotise-t-on plus ou moins avec une retraite par répartition?

A l'avenir, la retraite pourrait donc être financé à 15% de capitalisation donc: "C'est un peu difficile de savoir de quoi on parle, la capitalisation, c'est un mot-valise et ça existe déjà en France", dénonce ce jeudi sur RMC Story l'économiste Michaël Zemmour, enseignant à l'université Lyon-2. "Il y a des dispositifs volontaires, mais c'est coûteux en argent public car subventionné par des niches fiscales et la plupart des Français n'y ont pas recours".

"Edouard Philippe reconnaît implicitement que dans une société vieillissante il va falloir cotiser plus. La question c'est, est-ce qu'on cotise plus en répartition ou en capitalisation?", avance Michaël Zemmour.
Le choix d'Apolline : Michaël Zemmour - 05/06
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Des inégalités plus marquées avec l'exemple allemand?

Et cette question se heurte au système français "assez atypique". Dans la plupart des pays européens, il y a "un étage de capitalisation en plus" parfois deux: "Le premier étage est obligatoire, comme vous êtes obligés d'avoir une mutuelle en entreprise, vous êtes obligé d'avoir une part de cotisation par capitalisation", détaille l'économiste Michaël Zemmour. "Les étages supplémentaires, c'est un étage volontaire où vous pouvez individuellement, épargner plus. Cela existe déjà en France mais ce n'est pas très utilisé".

Et dans les pays européens où la retraite par capitalisation est mise en place, il y aurait des inégalités plus marquées: "Le niveau moyen de la retraite est plus faible. Chez les personnes aisées il est comparable à la France mais dès que vous avez eu un accident de carrière, enfants, chômage, vous n'avez pas cotisé et vous le payez intégralement à votre retraite", explique l'économiste.

"L'avantage principal par répartition, c'est qu'il permet d'intégrer beaucoup plus de solidarité".

Le mauvais exemple allemand?

L'ex-Premier ministre Edouard Philippe invoque l'exemple de l'Allemagne notamment pour illustrer le système de retraite par capitalisation. Un très mauvais exemple pour Michaël Zemmour: "C'est un exemple repoussoir. Dans les années 2000 le gouvernement allemand a instauré une part de capitalisation. Et 20 ans plus tard, les gens qui arrivent à la retraite ont des pensions très décevantes, ce n'est pas le modèle à imiter".

Michaël Zemmour estime que le système par répartition actuel "fonctionne" et pourrait "être fortifié par davantage de ressources", mais que la question est éludée par le patronat et Edouard Philippe donc. Quant à son déficit l'économiste estime qu'"il faut le piloter" et que "la dramatisation qui n'est pas bonne". "Le système de retraite en lui-même n'est pas en danger, ses comptes ne sont pas en faillite, mais la question c'est comment faire les ajustements?", conclut-il.

Guillaume Dussourt Journaliste BFMTV-RMC