Retraite minimum à 1.200 euros: pourquoi on est très loin de la promesse initiale
Combien de retraités vont-ils réellement toucher une pension de 1.200 euros grâce à la réforme des retraites? La question fait l’objet d’une féroce bataille de chiffres à l’Assemblée.
Une question importante parce qu’il faut se souvenir que cette idée d’une retraite minimum à 1.200 euros brut était au cœur de la réforme. Pendant la campagne présidentielle 2022, sur TF1, Emmanuel Macron avait expliqué qu’il fallait repousser l'âge de départ à 65 ou 64 ans pour pouvoir revaloriser les petites pensions. C'était donnant-donnant.
"Est-ce que l’on peut vivre avec 980 euros par mois?", avait demandé le président de la République sortant. La réponse est non, on va mettre en place une retraite minimum à 85% du Smic. C'était une promesse très claire. Formulée à la télévision puis par écrit dans la profession de foi du candidat Emmanuel Macron. Et tous les ministres ont ensuite laissé croire que la réforme allait permettre à tous les retraités de toucher cette somme minimum.
Par exemple le ministre des Relations avec le parlement, Franck Riester, qui a dit : "Pas moins de 1.200 euros par mois, c’est notre engagement". La secrétaire d'Etat Marlène Schiappa a parlé d’un "plancher" à 1.200 euros. "Retraite minimum" ont dit Bruno Le Maire et Gabriel Attal. Et Olivier Véran, le porte-parole du gouvernement, a estimé que 2 millions de retraités allaient bénéficier de ce plancher. Sauf que c’est beaucoup plus compliqué que cela.
Parce qu’en découvrant le détail de la réforme, on a compris qu’il y avait de strictes conditions pour bénéficier de la hausse promise. Il faut avoir travaillé à temps plein, pendant 43 ans, au Smic. Si vous n’avez pas une carrière complète, vous n’en bénéficierez pas de cette retraite minimum. Si vous avez travaillé un moment à temps partiel, non plus.
Finalement, combien de retraités concernés?
La question a été posée plusieurs fois à Olivier Dussopt à l’Assemblée, sans qu’il y réponde. Puis finalement, mercredi, il a donné un chiffre: 40.000 retraités passeront chaque année le cap des 1.200 euros brut par mois grâce à la réforme.
Mais le chiffre a aussitôt été contesté. Le député socialiste Jérôme Guedj s’est rendu à la direction de la sécurité sociale pour demander d’où sort ce chiffre de 40.000. Et selon lui, l'administration lui a répondu que ce n’était pas 40.000 mais seulement 13.300 nouveaux retraités qui bénéficieront effectivement de la réforme en étant augmentés de 100 euros.
Jérôme Guedj a alors traité le ministre du Travail de menteur. Olivier Dussopt lui a répondu qu’il perdait les pédales, mais il a reconnu qu’effectivement l’an prochain la mesure ne touchera que 13.000 retraités. Le chiffre de 40.000 bénéficiaires est attendu pour l’année 2030. Ce qu’il avait oublié de dire dans un premier temps.
Olivier Dussopt fait valoir que de très nombreux retraités pauvres vont tout de même voir leur pension augmenter. Il donne le chiffre de 1.800.000 retraités qui vont avoir une augmentation. Dont la moitié qui auront une augmentation de 70 à 80 euros par mois. Mais 30% qui auront moins de 30 euros d'augmentation.
Mais on peut prendre les chiffres différemment. Il y a actuellement en France 5 millions de retraités qui touchent moins de 1.000 euros par mois. La plus grande partie d’entre eux ne vont bénéficier d’aucune augmentation parce qu’ils n’ont pas de carrière complète. Quant à ceux qui bénéficieront de l’augmentation maximale de 100 euros, cela ne les amènera toujours pas forcément à 1.200 euros bruts par mois. On est loin de la promesse initiale d’une retraite minimum pour tous.