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Semaine de quatre jours: quels sont les avantages et inconvénients?

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Le débat sur la semaine de quatre jours revient avec la multiplication des expérimentations, dans divers secteurs économiques. Les retours semblent positifs, mais quelques interrogations subsistent.

Transformer cinq colonnes de Lego en quatre colonnes plus fournies: un jeu d'enfant? La sempiternelle question du passage à la semaine de quatre jours au travail revient, avec un débat relancé par une expérimentation de l'Ursaf (l'Union de recouvrement des cotisations de Sécurité sociale et d'allocations familiales) de Picardie. Cette dernière passe donc à une semaine de 36 heures étalées sur quatre jours entre le 1er janvier 2023 et le 1er mars.

Voilà qui fait des journées de 9 heures de travail. Une "expérimentation sur le bien-être au travail", selon le ministre délégué aux Comptes publics Gabriel Attal dans les colonnes du journal L’Opinion.

"Quand on y passe, peu veulent revenir en arrière"

Fondateur du groupe de commerce en ligne LDLC, Laurent de la Clergerie a pris le pari depuis quelques années d'imposer la semaine de quatre jours à ses salariés, sur 32 heures en revanche, sans baisse de salaire.

Dans "Apolline Matin" ce jeudi sur RMC et RMC Story, il explique que, selon une consultation interne de son groupe, 33% d'entre-eux ne voudraient jamais revenir à une semaine de cinq jours et 56% de ses employés diraient avoir beaucoup de mal à retravailler dans une boîte qui est aux cinq jours. Il reste des nostalgiques, mais ils sont très peu: parmi les 1.050 salariés du groupe, 1% seulement aimeraient revenir en arrière.

"Quand on a mis en place, on l'a imposé aux salariés, mais aujourd'hui on voit que peu veulent revenir en arrière", confirme Laurent de la Clergerie.

Quelles réticences?

Benoît Serre, vice-président de l'association nationale des DRH, également invité de RMC ce jeudi matin, "comprend très bien" que sur le plan individuel, ce soit "extrêmement séduisant", mais a tout de même quelques réticences et interrogations sur le plan collectif. Notamment sur la présence physique: "Si c'est quatre jours, avec deux jours en télétravail, on va finir par ne plus se voir du tout", s'inquiète-t-il.

Le rythme est également source de doutes pour lui: "Cela peut être une intensification du travail extrêmement forte", note-t-il. Le débat reste selon lui "intéressant", concédant qu'il faut de toute façon "revoir les modèles d'organisation des entreprises".

Laurent de la Clergerie confirme d'ailleurs que les moments "sociaux" sont importants, et que ça reste compliqué dans une organisation à quatre jours par semaine dont deux de télétravail. "Il manquait des temps de vie sociale où les gens, les services, se croisent. On sent qu'il y a quelque chose qui se délite, c'est pour cela que l'on va revenir à un jour (de télétravail)", explique-t-il.

Moins d'absentéisme?

La question de la liberté de l'organisation du travail est soulevée par ce débat. Benoît Serre, vice-président de l'association nationale des DRH, confirme qu'il y a une "appétence et même une impatience" des Français à avoir plus de liberté au travail. Des modèles qui, selon les premiers retours des différentes expérimentations, conduisent d'ailleurs à moins d'absentéisme.

Mais Benoît Serre estime la semaine de quatre jours ne doit pas être standardisée, mais adaptée en fonction des secteurs et entreprises.

"Il ne faut surtout pas qu'on légifère sur ce sujet, clame-t-il. Chaque entreprise a une dynamique différente. Il faut que ce soit adapté à l'activité."

Dans le domaine de la restauration, cela semble en tout cas fonctionner selon les expérimentations du chef Florent Ladeyn, à la tête de trois restaurants dans le Nord. L'ancien de TopChef explique sur RMC que la semaine de quatre jours de travail est déjà une réalité pour ses 60 équipiers. Et, selon lui, c'est un succès, pour tout le monde.

"La charge de travail est toujours la même. Les rythmes sont soutenus, il a juste fallu embaucher un peu plus. Je travaille avec des gens reposés et qui sont à 110%, même mentalement, car ils ont pu décompresser à un moment. Vie sociale, sport... On a un super beau métier mais il ne faut pas s'enfermer dedans", juge-t-il.

Un système gagnant-gagnant selon lui: "Si on est heureux à la maison, il y a plus de chances qu'on soit heureux au travail. Et inversement", conclut-il.

Il y aurait 10.000 salariés en France, soumis à cette cadence qui donne envie à beaucoup d'autres. Reste à voir à quel rythme sa démocratisation se poursuivra.

James Abbott