Télétravail pour tout le monde: qu'est-ce qui bloque encore dans les négociations?

Ultime réunion entre patronat et syndicats. L'objectif est simple: mieux encadrer le télétravail.
Cette négociation doit, en principe, aboutir à un accord national interprofessionnel, censé être transcrit en loi et applicable à toutes les entreprises de France. Mais après des négociations tendues, les deux parties sont encore loin d'aboutir à un accord. De cette réunion dépendent pourtant les conditions de travail de millions de Français, dont beaucoup expérimentent le télétravail à l'occasion de l'épidémie.
Alors qu'est-ce qui bloque?
Ce qui bloque, c'est premièrement que les syndicats veulent un accord contraignant, qui s'appliquerait à tous les salariés, alors que les chefs d'entreprise refusent des obligations supplémentaires. Ils considèrent, par exemple, que c'est à eux de décider quels postes peuvent être réalisés à distance ou non. Ils n'acceptent pas non plus l'idée de prendre en charge les accidents du travail dans le cas où le salarié serait chez lui.
Mais pour les syndicats, pas question d'assouplir la règle. Les syndicats qui réclament enfin un dispositif clair en ce qui concerne les frais professionnels. Qui payera le surplus sur la facture d'électricité du salarié en télétravail? Son abonnement Internet? Ses repas? Pour la CFDT, le texte est encore trop flou, et quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup.
"C'est une ouverture, peut-être, sur le monde de demain, dans le sens où le télétravail va prendre de l'ampleur. On s'aperçoit qu'il y a beaucoup de professions qui peuvent télétravailler et que l'on a découvert au travers de confinement que l'on vient de traverser. D'où l'intérêt de cadrer les choses: pas de bloquer l'employeur, on ne veut pas imposer. Mais, par contre, les gens qu'il va mettre en télétravail, on veut que ça, ça soit cadré" précise Eric Courpotin, le négociateur de la CFTC.
Télétravail recommandé, mais peu appliqué
La négociation est suivie de près par Elisabeth Borne. Depuis fin octobre, la ministre du Travail a fait du télétravail "la règle" dans les entreprises qui le peuvent, afin de limiter la pandémie, et ne cesse de répéter qu'un accord donnerait "des repères" aux employeurs.
Selon un sondage de Cadremploi réalisé du 6 au 9 novembre et publié mercredi, quatre cadres sur dix (39%) alternaient télétravail et activité en présentiel dans les premiers jours du reconfinement, tandis que près d'un tiers des cadres (32%) télétravaillaient à 100%.
À côté de ces salariés de l'encadrement pratiquant totalement ou occasionnellement le télétravail, un cadre sur six (17%) a travaillé uniquement en présentiel. Et l'entreprise de 3% des cadres a été "contrainte de fermer", indique Cadremploi.
Parmi les cadres qui alternent présentiel et télétravail, plus de la moitié (56%) expliquent que c'est leur "entreprise (qui) ne souhaite pas mettre en place le télétravail à 100%". Plus d'un tiers (34%) indiquent que leur activité "ne permet pas" une pratique du télétravail cinq jours sur cinq. Et près de deux sur dix (16%) "ne souhaitent pas" eux-mêmes être en télétravail à 100%.
Environ les deux tiers des cadres qui télétravaillent partiellement ou à 100% disent gagner grâce au télétravail en efficacité (65%), productivité (63%) et concentration (63%). Environ la moitié se plaignent d'un impact négatif sur leur posture (54%), activité physique (47%) et déconnexion (47%).