Espionnage: quand les ordinateurs de l'Élysée étaient visités par un virus espion
L'administration américaine a écouté les trois derniers présidents français, comme l'atteste les révélations de Wikileaks, mais il y a de fortes suspicions que les ordinateurs de l'Élysée ont été fouillés entre 2011 et 2012. Fin 2011, l'Élysée a en effet découvert un mouchard dans son serveur informatique, très probablement un virus-espion américain. Un virus dormant, qui ciblait certains ordinateurs, certains services de l’Élysée, et qui ponctionnait, de temps en temps, les fichiers et les informations qui l’intéressait.
En pleine campagne pour la présidentielle de 2012, l’affaire a longtemps été étouffée : elle prouvait la vulnérabilité des services de l’État. Ce virus espion a été découvert, puis éliminé par Bernard Muenkel, ancien patron du service informatique de l’Élysée, invité ce jeudi matin chez Jean-Jacques Bourdin.
"Rien ne l'arrêtait et personne ne le voyait"
"Quand je suis arrivé à l'Élysée, je ne pensais pas que nous étions surveillés. Puis fin 2011, début 2012, nous avons trouvé un intrus chez nous. Il passait les pare-feux, les antivirus. Rien ne l'arrêtait et personne ne le voyait", raconte-t-il. "Au départ on découvre le problème, et c'est petit à petit en remontant le fil que l'on va se rendre compte que ce sont nos 'amis' américain qui sont derrière cela".
Une fois le virus repéré, Bernard Muenkel reçoit alors carte blanche de la part de Christian Frémont, directeur de cabinet du président Sarkozy, pour l'éliminer. "J'ai alors donné comme tâche à certains de mes collaborateurs, qui sont des militaires, d'aller inspecter tous les câbles et équipements installés au Palais", poursuit Bernard Muenkel. Mais ses investigations ont dû s'arrêter aux portes de l'Élysée, raconte-t-il aujourd'hui. "Lorsque j'ai demandé de suivre le câble de fibre à l'extérieur de l'Élysée, qui va dans les égouts de Paris, cela m'a été refusé. Et ce câble se trouve dans la rue du faubourg-St-Honoré", la rue où se trouve l'ambassade américaine, qui jouxte l'Élysée.
"On m'a expliqué que ma responsabilité s'arrêtait aux murs du Palais"
"On m'a expliqué que ma responsabilité s'arrêtait aux murs du Palais et que la rue faisait partie d'un autre domaine", regrette-t-il. C'était les égouts, je considère que c'était encore le territoire français, on pouvait au moins suivre notre câble pour vérifier qu'il n'y avait pas un boîtier de dérivation. Mais on m'a dit non". Nous sommes alors en pleine campagne présidentielle, et le sujet est trop sensible pour être dévoilé.
Les services de Bernard Muenkel, une fois identifié le virus, ont retrouvé sa trace en 2010. Il explique que des informations sur les relations de la France avec des pays méditerranéens (Liban, Israël, Libye…) ont été interceptées au moment de la mise en place de l'Union pour la Méditerranée, à l'initiative de la France.