Comment s'informent les Ukrainiens en temps de guerre?
Coincés dans leur chambre d'hôtel, Elena et Pavel passent leur journée à suivre les nouvelles de Kharkiv. Ils découvrent à distance les immenses dégâts dans la ville qu'ils ont réussi à fuir il y a quelques jours. "Je suis en permanence en train de suivre ce qu’il se passe dans le pays. Quand je suis au téléphone avec mes proches qui sont restés dans les villes bombardées, je me tiens informé de ce qu’il se passe. Ce n’est pas 3-4 fois par jour, c’est tout le temps", assure Pavel à RMC.
Elena, tout juste 70 ans, garde toujours à proximité d’elle sa tablette sur laquelle elle suit de nombreux comptes sur l'application Telegram, très populaire ici en Ukraine: "C’est notre fille qui nous a conseillé d’installer cette application. Cela nous permet à la fois de garder contact régulièrement avec elle et d’avoir des nouvelles. L’application est très bien faite, les informations arrivent très rapidement".
"Nous sommes tous des cibles pour l’armée russe"
Si les Ukrainiens s'informent beaucoup sur internet, les médias traditionnels restent très suivis. Dans un studio, un animateur présente en direct une émission spéciale. Il y a sept jours pourtant, un missile russe a frappé la tour de la télévision à Kiev, tuant cinq personnes. Une attaque qui a choqué Mariyana Frey, la rédactrice en chef au sein de la télévision publique ukrainienne.
"Aucun de nos employés n’a fait partie des victimes. Mais sur le coup, on s’est tous dit que cela aurait pu être l’un de nous. C'est très dur à vivre. Nous avons pris conscience que nous sommes tous des cibles pour l’armée russe", déplore-t-elle.
Sur les 25 bureaux que comptait la télévision publique ukrainienne, trois ont été détruits ou pris par l’armée russe. Impossible donc d’assurer les programmes habituels. Les chaînes du pays ont donc passé un accord pour partager le même canal. Chacune assure à tour de rôle cinq heures d’antenne par jour, se félicite Mykola Chernotytskyi, le directeur de la télévision publique ukrainienne.
"Nous travaillons main dans la main avec les autres médias. Nous avons regroupé nos télés, nos radios, on s’entraide aussi pour nos sites internet. Notre objectif est de continuer à remplir notre mission en ces temps difficiles : informer les citoyens de ce qu’il se passe dans le pays en ce moment", explique-t-il.
La publicité remplacée par des clips de propagande
À la télévision, on diffuse donc des émissions spéciales quasiment tout le temps. De jour comme de nuit. Il est question du conflit, avec des interventions venues de partout dans le pays, y compris depuis les zones qui sont bombardées très régulièrement par l’armée russe. Mais ces informations sont le point de vue ukrainien de la guerre, les bilans donnés par le ministère de la Défense ici sont diffusés à l’antenne sans aucune vérification.
Chaque intervenant ou presque ponctue ses interventions par des "Gloire à l’Ukraine" et les publicités ont été remplacés par des films de propagandes à la gloire des soldats ukrainiens. C'est donc une atmosphère très patriotique qui prédomine. Depuis le début de la guerre, le pays fait front commun contre la Russie. Y compris les médias.
>> A LIRE AUSSI - Une frappe russe contre une tour de télévision à Kiev fait 5 morts, la diffusion interrompue