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Cyberattaques: le Français Sébastien Raoult a été extradé vers les USA et risque 116 ans de prison

Un jeune Français de 21 ans, Sébastien Raoult, a été extradé du Maroc en direction des Etats-Unis mercredi 25 janvier. Il est accusé par les autorités américaines d’avoir notamment participé à des cyberattaques contre des entreprises, et de faire partie d’un groupe de cybercriminels appelé les “ShinyHunters”.

C’est l’histoire d’un garçon de 21 ans seulement, barbu et aux cheveux longs, passionné d’informatique et originaire d'Epinal (Vosges).

L’an dernier, Sébastien Raoult a arrêté les études qu’il faisait à Nancy pour attaquer un tour du monde. Il passe trois mois au Maroc mais au moment de quitter le pays, le 31 mai 2022, il est arrêté par les forces de l’ordre à Tanger (nord du Maroc), sur la base d'une notice rouge émise par Interpol à la demande de la justice américaine.

Finalement après plus de six mois passés dans une prison de Rabat, c’est le FBI qui est venu le chercher mercredi pour l’extrader en direction de New-York. C’est exactement ce que sa famille et son avocat voulaient éviter parce qu’aux Etats-Unis, il risque 116 ans de prison…

Ce qui est reproché au jeune suspect

Pourquoi cet acharnement des Américains sur la personne de Sébastien Raoult? Car il est accusé d’être l’un des principaux animateurs d’un groupe de hackers, nommé les Shinyhunters (une appellation en référence à la chasse aux Pokémon).

D'après l’acte d'accusation, ces cyberpirates se sont introduits dans les systèmes informatiques d’une dizaine de grandes sociétés dans le monde, dont Microsoft. Ils ont ensuite demandé des rançons à leurs victimes, avant de proposer à la vente en ligne les millions de données qu’ils avaient volé.

Selon le FBI, ces infractions ont été commises à partir d’adresses IP françaises et plus récemment depuis le Maroc. Les policiers américains auraient également mis la main sur des conversations attribuées à Sébastien Raoult, dans lequel il évoquait les piratages.

Selon l’hebdomadaire L’Obs qui avait révélé l’affaire, les Américains sont à la recherche d’autres français soupçonnés de faits similaires. Mais, grande différence, eux sont en France. Ces suspects ont été entendus par la police française mais ont pour l’heure été laissés en liberté, sans poursuite pour le moment. La France, de toutes façons, n'extrade pas ses ressortissants vers les Etats-Unis.

"Du jamais vu dans l'histoire" dénonce l'avocat de Raoult

Sébastien Raoult, lui, a eu la mauvaise idée de se trouver au Maroc. Son avocat, Me Philippe Ohayon, avait saisi fin décembre le Comité contre la torture de l'ONU, redoutant sa prochaine extradition vers les Etats-Unis, mais cette instance a refusé d'enregistrer sa demande.

Il a saisi depuis le Comité des droits de l'homme de l'ONU. "Alors que le Comité des droits de l'homme est saisi, il semble que l'extradition ait été précipitée. Ce genre de manoeuvre entre les États-Unis et la France ne doit plus jamais se reproduire", a déploré l'avocat.

"Ici, Français et Américains se sont entendus pour provoquer l'extradition d'un Français pour des faits commis en France dans le cadre d'une enquête menée par un juge d'instruction français. C'est du jamais vu dans l'histoire judiciaire", a accusé Me Ohayon.

Selon le père de Sébastien Raoult, le jeune homme nie les faits et affirme que ses comptes ont été utilisés à son insu.

Cette extradition survient dans un contexte de crise diplomatique persistante entre le Maroc et la France, accusée ces derniers jours d'avoir "orchestré" une campagne anti-marocaine à Bruxelles.

Parlementaires et médias marocains ont dénoncé le vote, récemment, d'une résolution du Parlement européen qui s'est inquiété de la détérioration de la liberté de la presse au Maroc et d'allégations de corruption pesant sur ce pays.

Nicolas Poincaré, Alexis Lalemant avec l'AFP