Espagne: le Parlement adopte une loi créant un "congé menstruel" inédit en Europe

La ministre espagnole de l'Égalité, Irene Montero (photo d'illustration). - Thomas COEX / AFP
C'est une mesure inédite en Europe et rare dans le monde: le Parlement espagnol a voté définitivement une loi créant un "congé menstruel" pour les femmes souffrant de règles douloureuses, ce jeudi.
"C'est un jour historique pour les avancées féministes", a lancé sur Twitter la ministre de l'Egalité Irene Montero, membre de la formation de gauche radicale Podemos, alliée des socialistes au sein de l'exécutif. Objectif de cette mesure selon le gouvernement: briser un tabou.
Avec cette loi, "l'arrêt de travail d'une femme en cas de règles incapacitantes" liées, par exemple, "à des pathologies comme l'endométriose" sera "reconnu comme une situation spéciale d'incapacité temporaire" de travail.
"Il s'agit d'accorder à cette situation pathologique une régulation adaptée afin d'éliminer tout biais négatif" pour les femmes "dans le monde du travail", ajoute le texte.
Aucune précision ne figure dans la loi sur la durée de cet arrêt maladie, qui devra être accordé par un médecin et sera financé par la Sécurité sociale.
Un frein à l'embauche des femmes?
Ce "congé menstruel" a toutefois suscité des réticences au sein de l'aile socialiste du gouvernement et a même été critiqué par le syndicat UGT. Cette centrale syndicale d'obédience socialiste, l'une des deux plus grandes du pays, s'est notamment inquiétée d'un possible frein à l'embauche des femmes de la part d'employeurs voulant éviter ces absences.
Pour sa part, le Parti Populaire (PP, conservateur), principale formation de l'opposition de droite, a mis en garde contre un risque de "marginalisation" et de "stigmatisation", et contre les "conséquences négatives sur le marché du travail" pour les femmes.
Cette mesure pour le congé menstruel fait partie d'un projet de loi bien plus large. Ce dernier vise, notamment, à renforcer l'accès l'accès à l'avortement dans les hôpitaux publics, qui pratiquent moins de 15% des IVG dans le pays, en raison notamment d'une objection de conscience massive des médecins.
Des avancées aussi pour les mineurs
Cette loi va également permettre aux mineures d'avorter sans l'autorisation de leurs parents à 16 et 17 ans en revenant sur une obligation instaurée en 2015 par un gouvernement conservateur.
L'avortement a été dépénalisé en Espagne en 1985, puis légalisé en 2010, mais l'IVG reste un droit semé d'embûches dans ce pays de tradition catholique.
La loi adoptée jeudi prévoit aussi un renforcement de l'éducation sexuelle dans les écoles, ainsi que la distribution gratuite de moyens contraceptifs ou de produits d'hygiène menstruelle dans les lycées.
L'Espagne est un pays considéré comme une référence en matière de droits des femmes en Europe, notamment depuis l'adoption en 2004 d'une loi sur les violences de genre. Se revendiquant féministe, le gouvernement Sanchez compte plus de femmes que d'hommes.