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Gaza: le Conseil de sécurité adopte sa première résolution pour un "cessez-le-feu immédiat", les Etats-Unis s'abstiennent

Des Palestiniens s'enfuient après une frappe israélienne à Gaza, le 18 mars 2024

Des Palestiniens s'enfuient après une frappe israélienne à Gaza, le 18 mars 2024 - AFP

Après plus de cinq mois de guerre, le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté lundi 25 mars sa première résolution exigeant un "cessez-le-feu immédiat" à Gaza, un appel bloqué plusieurs fois par les Etats-Unis qui se sont cette fois abstenus.

Après des mois de "silence assourdissant", le Conseil de sécurité de l'ONU a enfin exigé lundi un "cessez-le-feu immédiat" à Gaza, un appel bloqué plusieurs fois par les Etats-Unis qui se sont cette fois abstenus, provoquant la colère de leur allié israélien.

La résolution adoptée par 14 voix pour, et une abstention, "exige un cessez-le-feu immédiat pour le mois du ramadan", qui a déjà commencé il y a deux semaines, devant "mener à un cessez-le-feu durable" et "exige la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages".

"Le Conseil de sécurité vient d'approuver une résolution très attendue sur Gaza, exigeant un cessez-le-feu immédiat et la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages. Cette résolution doit être mise en œuvre. Un échec serait impardonnable", a écrit sur X (Twitter) le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres.

Arrêter le "bain de sang"

"Enfin, le Conseil de sécurité prend ses responsabilités" pour arrêter "ce bain de sang", a salué l'ambassadeur algérien Amar Bendjama. Ce "jour historique" doit "être un tournant (...), le signal de la fin de cet assaut d'atrocités contre notre peuple", a renchéri la voix serrée l'ambassadeur palestinien Riyad Mansour.

De nombreux membres du Conseil, tout comme le porte-parole de l'ONU, ont insisté sur le fait que ce texte fait loi, mais les Américains assurent qu'il n'est "pas contraignant". Les résolutions du Conseil sont de toutes façons souvent ignorées par les pays concernés.

Le ministre israélien de la Défense Yoav Gallant a d'ailleurs déjà assuré qu'Israël ne mettrait pas fin à sa guerre "tant qu'il y a des otages à Gaza". Ne pas appliquer cette résolution serait "impardonnable", a jugé le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres.

La résolution "reconnaît" l'existence des pourparlers menés par le Qatar, l'Égypte et les États-Unis pour une trêve en échange des otages capturés lors de l'attaque sanglante et sans précédent du Hamas le 7 octobre sur le sol israélien.

Mais l'ambassadrice américaine, Linda Thomas-Greenfield, a, elle, insisté sur un lien entre cessez-le-feu et libération des otages, mettant la pression sur le Hamas.

"Pas de changement de cap"

"Un cessez-le-feu peut commencer immédiatement après la libération d'un premier otage (...) C'est le seul moyen d'assurer un cessez-le-feu et la libération des otages", a-t-elle déclaré.

La Maison Blanche a assuré que l'abstention américaine n'était pas un "changement de cap", et s'est dite "quelque peu surprise" de la réaction d'Israël qui a annulé la visite d'une délégation à Washington.

Vendredi, la Russie et la Chine avaient mis leur veto à un projet de résolution américaine soulignant la "nécessité" d'un "cessez-le-feu immédiat" à Gaza, en lien avec les négociations sur le terrain.

Certains observateurs y avaient vu une évolution substantielle de la position de Washington, sous pression pour limiter son soutien à Israël alors que l'offensive israélienne a fait plus de 32.000 morts à Gaza, selon le ministère de la Santé du Hamas.

Les États-Unis s'étaient en effet jusqu'alors systématiquement opposés au terme "cessez-le-feu", bloquant trois projets de résolution en ce sens. Mais le texte américain rejeté n'appelait pas explicitement à un cessez-le-feu immédiat.

Et après le ramadan?

La résolution adoptée lundi est issue du travail de membres non-permanents du Conseil, qui ont négocié tout le week-end avec les Etats-Unis pour tenter d'éviter un nouvel échec. La résolution réclame d'autre part la "levée de tous les obstacles" à l'aide humanitaire.

Le Conseil, largement divisé sur le dossier israélo-palestinien depuis des années, n'avait jusqu'alors pu adopter sur cette question depuis le 7 octobre que deux résolutions (sur neuf soumises au vote), essentiellement humanitaires. Sans grand résultat: l'entrée de l'aide à Gaza, assiégée, reste largement insuffisante et la famine plane.

La nouvelle résolution condamne d'autre part "tous les actes terroristes", mais sans mentionner les attaques du Hamas du 7 octobre qui ont entraîné la mort d'au moins 1.160 personnes, pour la plupart des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

Le Conseil et l'Assemblée générale n'ont jamais spécifiquement condamné les attaques du Hamas du 7 octobre, une absence systématiquement fustigée par Israël.

Alors que la résolution adoptée lundi se concentre sur le ramadan, plusieurs pays ont insisté sur la nécessité d'une vision à plus long terme pour permettre notamment de faire taire les armes de façon permanente.

Le Conseil devra "oeuvrer au relèvement et à la stabilisation de Gaza" et "remettre un processus politique sur les rails visant à l'établissement de la solution des deux États", a insisté l'ambassadeur français Nicolas de Rivière, félicitant le Conseil d'être sorti de son "silence assourdissant".

CA avec AFP