Guerre Israël-Hamas: "La France a un immense rôle à jouer", pour l'avocat Patrick Klugman

L’influence diplomatique de la France va-t-elle permettre de trouver une solution pour les otages capturés par le Hamas en Israël? Et la justice française va-t-elle pouvoir retrouver et condamner les coupables de crimes de guerre? C’est ce que souhaite l’avocat Patrick Klugman, qui a défendu la famille de l'ex-otage franco-israélien Gilad Shalit, retenu de 2006 à 2011 par des combattants palestiniens. "La France a un immense rôle à jouer, parce que nous avons des liens avec tout le monde", souligne-t-il dans Apolline Matin ce jeudi sur RMC et RMC Story.
Après avoir pénétré sur le sol israélien samedi dernier à l’aube, les terroristes ont pris en otage des dizaines de personnes et les ont ramenées vers la bande de Gaza. Selon l’armée israélienne, 50 otages ont été identifiés, mais il y en aurait au total entre 150 et 200. Dont des Français, sans doute. En plus de ses 11 ressortissants tués, la France est sans nouvelle de 18 personnes. "L’enlèvement, le déplacement de population civile dans le cadre d’un conflit, ce sont des crimes de guerre. Et il y a probablement des crimes contre l’humanité dans les kibboutz limitrophes de Gaza", explique Me Patrick Klugman, qui écarte rigoureusement le paiement de rançons.
"Négocier avec des terroristes, des gens qui prennent des otages, c’est interdit dans notre droit, rappelle-t-il. Vous ne payez pas une rançon aux gens qui prennent des otages. Sinon, vous continuez le crime, vous encouragez des bandes de terroristes. Il faut bien se rendre qu’il n’y a aucune bonne option sur la table. Le Hamas, ce n’est pas une organisation politique telle que nous en connaissons, ce n’est pas un gouvernement. C’est une organisation qui a un but uniquement militaire, et uniquement terroriste dans sa mise en exécution. Leur but, leur charte, c’est de faucher des vies juives, même pas seulement israéliennes."
"Ce n’est pas encore le moment du droit"
Selon Patrick Klugman, après l’opération militaire en cours sur la bande de Gaza, Israël fera tout pour obtenir la libération des otages. "Beaucoup de gens disent qu’Israël n’en a rien à faire des otages, qu’il veut juste détruire le Hamas. Je trouve ça ignoble de dire cela, surtout quand on connaît le précédent avec Gilad Shalit. Benjamin Netanyahu, qui a fait cet accord, a libéré 1.000 personnes qui étaient jugées, condamnées, pour permettre le retour d’un seul et pour récupérer des dépouilles. C’est vous dire le fonctionnement de la société israélienne, parce qu’il y avait un consensus."
Et en parallèle des actions israéliennes, la France pourra lancer des procédures judiciaires. "La loi pénale française s’applique pour tout Français victime d’un crime, où que ce soit dans le monde, rappelle Me Klugman. Elle peut s’appliquer pour chacune des personnes qui ont été assassinées et qui sont de nationalité française, pour chacune des personnes qui manquent à leurs familles. On réfléchit, avec certains de mes confrères, à mobiliser un collectif d’avocats pour représenter ces familles et les aider dans les démarches judiciaires."
"Ce n’est pas encore le moment du droit, ajoute-t-il. Mais en Ukraine, l’émission de mandats d’arrêt contre des responsables militaires, paramilitaires ou politiques russes entrave, qu’on le veuille ou non, l’action de la Russie. Nous savons que l’utilisation de l’outil judiciaire, dans le cadre de conflits armés, ça existe aussi. Cela fait partie de l’arsenal, des choses que la France devra envisager. On a de nombreux ressortissants impactés. On ne peut pas dire que nous sommes à la fois une grande puissance militaire et diplomatique, un pays pour qui le droit veut dire quelque chose, et croire que nous n’aurions aucun rôle à jouer dans cette affaire."