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Lampedusa: les arrivées de migrants se poursuivent, la cacophonie européenne aussi

La présidente de la commission européenne était ce week-end à Lampedusa, en Italie. Face à l’arrivée massive de migrants, elle prône la solidarité européenne. Une solidarité qui ne fonctionne pas.

Entre lundi et mercredi dernier, environ 8.500 personnes sont arrivées à Lampedusa, soit davantage que l'ensemble de la population de l'île. Face à cet afflux, la Commission européenne, par la voix de sa présidente Ursula Von der Leyen, appelle à la solidarité.

Mais en Europe, c’est plutôt la cacophonie qui règne. L’Italie demande de l’aide, la France par la voix d’Emmanuel Macron promet de ne pas laisser tomber les Italiens et parle de notre devoir de solidarité. Le ministre français de l'Intérieur Gérald Darmanin a annoncé lundi qu'il se rendrait à Rome dans "l'après-midi" pour livrer un message de "fermeté" face aux traversées clandestines de la Méditerranée, après l'afflux de migrants sur l'île italienne de Lampedusa la semaine dernière.

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Expliquez-nous par Nicolas Poincaré : Lampedusa, le fiasco de la solidarité européenne - 18/09
3:20

Les centres d'accueil complets en Belgique et en Allemagne

Dans le même temps, la Belgique indique qu’elle ne recevra aucun des migrants arrivés à Lampedusa, parce que ses centres d'accueil sont pleins. Et l’Allemagne est sur la même ligne. Elle avait fait savoir avant même la crise de la semaine dernière qu’elle n'accueillerait plus aucun demandeur d’asile en provenance d’Italie.

Tout cela prouve que les règles européennes actuelles sont dépassées. La règle actuelle date de 2013: c’est ce qu’on appelle le règlement de Dublin 3. Il prévoit qu’un réfugié doit demander l’asile dans le premier pays où il est entré. S’il arrive en Italie et se rend ensuite en France, il ne peut pas demander l'asile en France, il doit automatiquement être renvoyé en Italie.

Sauf que les Italiens refusent le retour de ceux que l’on appelle les "Dublinés" et c’est par mesure de rétorsion que les Allemands ne veulent plus de réfugiés venant d'Italie.

Les accords de Dublin ont surtout comme principal défaut de faire peser toute la charge sur les pays en première ligne, l’Italie et la Grèce. Pour les soulager, l'Europe a inventé un mécanisme de solidarité volontaire. 13 pays, dont la France, ont accepté sur la base du volontariat, de prendre en charge un certain nombre de demandeurs d’asile.

Résultat, les 13 pays tous ensemble se sont engagés à accueillir 8.000 personnes. Ce qui est très peu. Mais six mois après l’accord, seulement 117 personnes avaient pu bénéficier de ce que l’on appelle une relocalisation.

Les Européens négocient actuellement un nouveau mécanisme. Ils négocient tellement que cela fait trois ans qu’on en parle et qu'il n’y a toujours pas d’accord.

C’est ce qu’on appelle le "pacte migratoire": un système de solidarité "obligatoire". Chaque pays de l’Union européenne serait obligé de recevoir un certain quota de demandeurs d’asile sous peine d’une amende. Une amende de 20.000 euros par migrant non accueilli. L’argent serait reversé à ceux qui, eux, auraient rempli leurs obligations. Seulement plusieurs pays s’y opposent farouchement, la Hongrie et la Pologne notamment.

Accords avec les pays voisins

Les négociations se poursuivent. La France voudrait les voir aboutir avant la fin de l’année. En attendant, l'Europe essaie de contenir l’immigration clandestine en passant des accords avec les pays voisins.

C’est ce qui avait été négocié avec la Turquie en 2015. De très grosses subventions européennes en échange de la promesse par les Turcs de contrôler leur frontière. Et depuis huit ans, effectivement, l'Europe paye et les Turcs empêchent les réfugiés de passer massivement en Grèce.

Le même type d'accord a été signé cet été avec la Tunisie. 105 millions d’euros contre la promesse de mieux garder leur côte.

Sauf que cela se passe très mal. Les migrants d'Afrique noire sont de plus en plus nombreux, faute de pouvoir traverser vers l'Italie. Ils sont victimes de violences racistes, voire raccompagnés par l'armée dans le désert algérien. Et on ne peut pas dire que cela fonctionne, puisque c'est de Tunisie que sont partis les 8.500 réfugiés qui ont débarqué à Lampedusa la semaine dernière.

Ce week-end, Ursula Von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, a depuis Lampedusa évoqué l'idée d’augmenter sensiblement les aides à la Tunisie pour qu’elle contrôle mieux ses côtes.

Pas sûr que ce soit la solution, ni que les Tunisiens aient vraiment envie d'être les gardes-frontières de l'Europe.

Nicolas Poincaré avec P.B.