RMC

Opération Barkhane: pourquoi la France est-elle toujours engagée au Sahel?

Arrivée au Sahel en 2013 à l'appel du Mali, l'armée française y lutte contre les groupes djihadistes, qui cherchent à prendre le contrôle de la région. Un retrait des forces françaises aurait des conséquences jusqu'en Europe jugent plusieurs spécialistes de la question.

Après la mort de 13 soldats français dans une collision entre deux hélicoptères au Mali mardi, plusieurs voix se sont élevées contre la présence militaire française dans la région, où l’armée lutte contre le terrorisme depuis 2013.

Les députés de La France insoumise ont dans la foulée demandé au gouvernement "d'ouvrir une discussion sérieuse et rationnelle pour envisager les voies de sortie de la guerre", afin de mettre fin à un conflit "dont le sens échappe désormais à nombre de nos compatriotes et de Maliens".

"Les soldats sont destinés à être confrontés à la mort, donnée ou reçue. Il n’est pas incongru qu’ils tombent lorsqu’ils sont engagés dans une guerre", a tenu à rappeler dans un premier temps Michel Goya, historien et colonel de l’armée française ce mercredi matin sur RMC. L’ancien titulaire de la chaire d’histoire militaire à l’école de guerre a précisé que la France n’était pas en guerre contre le terrorisme : "Le terrorisme c’est un mode d’action, la guerre est une action politique contre des entités politiques. Au Sahel, nous affrontons des organisations djihadistes depuis pas mal de temps".

"Cette région est un hub pour les réseaux djihadistes et criminels en tout genre"

"Si nous sommes au Mali c’est parce que le Mali nous l’a demandé. Si nous n’étions pas intervenus il est probable que le Mali se serait effondré", a ajouté Michel Goya, rappelant qu'en 2013, "le nord du pays était une sorte de califat". "On ne peut pas se permettre de laisser s’effondrer des états dans la région", a-t-il assuré, estimant qu'il pourrait y avoir des répercussions jusqu'en Europe.

"Cette région est un hub pour les réseaux djihadistes et criminels en tout genre. C’est une zone d’instabilité à nos portes et tout ce qui s’y passe à des répercussions sur nous. Nous avons des intérêts à défendre en Afrique, notamment nos intérêts stratégiques", précise Michel Goya.

Un retrait qui rimerait avec une victoire des djihadistes

Un constat partagé par Vincent Hugeux, grand reporter à L'Express et ancien correspondant au Mali: "Si on laisse se rapprocher le péril djihadiste, les Européens s’apercevront trop tard que ce fléau les menacent eux aussi dans leurs libertés", explique-t-il au micro de RMC.

"La France n’a pas le choix. Elle est engagée sur ce terrain depuis des années. Se retirer c’est laisser la voie libre et ouverte à un projet djihadiste d’essence totalitaire", poursuit-il.

Et selon lui, la France doit rester en raison de la faiblesse de certains gouvernement, faisant la force des groupes djihadistes que la France combat: "Les djihadistes ne sont forts que parce que l'état malien et burkinabé sont faibles et corrompus. Les problèmes se concentrent notamment sur ces deux pays, alors que les choses se passent différemment au Tchad et en Mauritanie", explique l'ancien colonel.

"Si demain les autorités françaises décident le retrait, cela signifie que les djihadistes ont gagné" ajoute de son côté Vincent Hugeux. 

"Ça ne me choque pas qu'on veuille un débat sur la présence de la France au Mali ! Mais pour moi, si la force Barkhane quittait la région, ce serait une catastrophe", conclu sur RMC le Général Dominique Trinquand.

Il y a actuellement deux grandes opérations extérieures impliquant l'armée française: l'opération Barkhane au Mali qui mobilise 4.500 militaires soit la moitié des effectifs engagés à l'étranger, et l'opération Chammal en Irak et en Syrie où opère l'armée de l'air. D'autres soldats français assurent une présence permanente sur des bases à l'étranger comme à Djibouti ou en Côte d'Ivoire.

Guillaume Dussourt