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Sommet de la dernière chance sur le plastique: pourquoi les pays pétroliers s'opposent à un accord

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Les représentants de près de 180 pays se réunissent à partir de ce mardi à Genève, afin de tenter d'élaborer un traité qui réduirait la pollution plastique. L'enjeu repose sur la limitation - ou non - de la production. Muriel Papin, déléguée générale de l'association "No plastic in my sea", pointe sur RMC la responsabilité des pays pétroliers.

Bientôt un traité mondial visant à réduire la pollution plastique? C'est sur quoi planchent les représentants de près de 180 pays réunis depuis ce mardi à Genève, en Suisse. Ces nouveaux débats interviennent après l'échec, fin 2024, des discussions menées à Busan, en Corée du Sud. Un texte, qui pour rappel, est en discussion depuis trois ans.

"On a vu une centaine de pays qui ont vraiment émis le souhait de réussir un traité collectif ambitieux et contraignant, qui réduise la pollution plastique", commente ce mardi sur RMC Muriel Papin, déléguée générale de l'association "No plastic in my sea". "La plupart des pays à qui j'ai parlé ont dit qu'ils venaient à Genève pour trouver un accord", a de son côté affirmé auprès de l'AFP la directrice exécutive du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) Inger Andersen, qui organise les débats.

Les pays pétroliers ne veulent pas de limitation de la production

La question est de savoir si les pays vont réussir à s'accorder sur la nécessité - ou non - de réduire la production de plastique, ou bien simplement s'attarder sur les questions de recyclage et de traitement des déchets. "Il faut réduire la production, qui est aujourd’hui incontrôlée et insoutenable", répond d'emblée Muriel Papin dans Apolline Matin. C'était d'ailleurs ce qui avait fait capoter les négociations en Corée du Sud. Les pays pétroliers comme l'Arabie Saoudite, l'Iran ou la Russie s'étaient opposés à cette idée.

"Pour eux, le plastique représente une voie de croissance pour leur économie, d’autant plus que le pétrole est de moins en moins utilisé pour les carburants du fait du développement des voitures électriques. Le relais de croissance, c’est donc le plastique", poursuit Muriel Papin.

"Il ne faut pas uniquement des mesures réparatrices mais aussi des mesures préventives", plaide Muriel Papin

"Les pays gros producteurs de plastiques vont arriver à Genève avec l’intention qu’il n’y ait pas d’accord du tout, ou alors le moins ambitieux possible", avertit par ailleurs dans Le Monde une source diplomatique, qui participe aux pourparlers pour la France. De son côté, Greenpeace dénonce la présence massive de lobbyistes de l'industrie fossile en marge des négociations.

"On ne peut pas imaginer qu'une simple vue de la fin de vie des produits plastiques, le tri, le recyclage puisse tout résoudre", a estimé lundi Henri Bourgeois-Costa, directeur des affaires publiques à la Fondation Tara Océan, au micro de France Inter. "Le recyclage lui-même concentre les toxiques. On émet dans l'environnement aussi." "Si on se focalise uniquement sur le recyclage et le ramassage, tout en continuant à produire davantage, on ne s’en sortira pas", abonde Muriel Papin.

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Des risques pour la santé humaine

Si rien n'est fait, la consommation mondiale de plastique pourrait tripler d'ici 2060, selon les projections de l'OCDE. La planète produit actuellement 460 millions de tonnes de plastique chaque année, dont la moitié à usage unique. Et moins de 10% des déchets plastiques est recyclé. En se décomposant en micro et nanoplastiques qui contaminent les écosystèmes, les polymères pénètrent jusque dans le sang et les organes humains, montrent des études récentes

"Un travail de recherche assez récent a montré une corrélation entre la concentration de nanoplastiques et des accidents vasculaires plus nombreux ainsi qu’une mortalité cardiaque plus importante", a expliqué dans Libération Xavier Coumoul, professeur de toxicologie à l’université Paris-Cité.

"Les gens portent sur eux du pétrole sans le savoir"

La déléguée générale de l'association "No plastic in my sea" plaide pour que les usages du plastique soient davantage questionnés, notamment "l'usage unique", comme le gobelet en plastique ou l'eau embouteillée, dont on "peut, peut-être, se passer." "Il faut distinguer le plastique essentiel du non essentiel". Elle pointe également le développement de la fast-fashion, à base de textile synthétique. "Les gens portent du pétrole sur eux sans le savoir", déplore-t-elle, et rappelle que "70 % des textiles sont issus du pétrole".

Un autre point dur, rappelle l'AFP, l'établissement d'une liste de produits chimiques jugés "problématiques" pour la santé ou l'environnement: PFAS (polluants dits "éternels"), perturbateurs endocriniens, phtalates, bisphénols...

Léo Manson