"C'est anxiogène": des villages de plusieurs départements privés d'eau pour pollution record aux Pfas

"C'est anxiogène". Comme chaque semaine, Géraldine vient récupérer des bouteilles d'eau pour toute la semaine à venir. Depuis le 3 juillet, elle ne peut plus consommer l'eau du robinet, comme tous les habitants de Juvigny-sur-Loison et de 3 autres villages dans la Meuse, et 12 communes dans les Ardennes.
La faute aux Pfas, ces polluants éternels présents dans des proportions records dans les canalisations. Dans les 4 communes de la Meuse concernées, la concentration de Pfas dans l'eau est de 2,5 microgrammes par litre, soit plus de 25 fois le seuil réglementaire fixé à 0,1.
Des conséquences délétères sur la santé
"On y pense tous les jours parce que c’est pollué depuis un certain temps. Enfants, personnes âgées et adultes, nous avons bu cette eau", s'inquiète Géraldine. "On se sent un peu abandonnés parce qu'on n'a pas de réponse à nos questions", embraye Jackie, qui est, lui aussi, venu refaire son stock.
"Comment on fait pour se laver avec cette eau-là? Là, ça va être les vacances, on a les petits enfants, on se pose des questions: est-ce qu’on ne va pas les empoisonner? On réfléchit à les emmener ailleurs", se questionne Jackie, qui habite à Juvigny-sur-Loison depuis 13 ans.
Distribution limitée à 2 litres par jour et par habitant
Ce qui inquiète surtout les 3.500 habitants concernés au total, ce sont les conséquences sur la santé associées aux Pfas. Ces derniers peuvent notamment abîmer le système immunitaire et provoquer des maladies graves. "Ici, on a une surreprésentation de maladies auto-immunes", souligne Manu, qui a créé un groupe Facebook entre habitants.
"À titre personnel, dans les villages environnants, je connais quatre personnes atteintes de sclérose en plaques. Ce n'est pas anodin", s'alarme Manu.
Dans le département, une batterie de tests est en cours. Technicienne prélèvements dans un laboratoire, Nathalie intensifie ses prélèvements d’eau. "Tout le monde m’en parle, dans toute la Meuse. Les gens sont inquiets, vraiment, et puis ils ne savent pas comment ça va évoluer", raconte-t-elle.
"Ils font des prélèvements tous les 15 jours", témoigne Christian Saunois le maire de Han-les-Juvigny, une autre commune de la Meuse concernée. Son village organise lui aussi une distribution d'eau depuis le 3 juillet. La limite est fixée à 2 litres par jour et par habitant. "À la fin de l’année ça fait un peu plus de 20.000 euros. C'est une somme considérable, c'est pour ça qu'on demande aussi des aides", conclut l'élu, qui estime à 10% la part du budget total de la commune consacré à ces achats.