"Ça fait mal pour notre démocratie": fallait-il interdire les marches contre les violences policières?

Une "marche unitaire" est organisée ce samedi dans différentes villes de France, afin de manifester contre les violences policières et pour demander l'amélioration des "libertés publiques" tout en luttant "contre le racisme systémique".
Ces manifestations, dans lesquelles des heurts sont redoutés par les autorités, ne sont clairement pas du goût de tous : le syndicat de police Alliance, dans une lettre envoyée au ministre de l’Intérieur, a par exemple demandé l'interdiction de ces manifestations. C’est aussi ce que réclament certains politiques comme Eric Ciotti, le président des Républicains et député des Alpes-Maritimes qui a demandé sur X à Gérald Darmanin l’interdiction de la manifestation prévue à Nice.
Il estime que ce rassemblement est anti-police, un constat que partage le porte-parole du Syndicat indépendant des commissaires de police (SICP). Aux yeux de Matthieu Valet, ces rassemblements sont "des manifestations de la haine", organisés par des "incendiaires et des irresponsables".
Des distensions à gauche
Plus tôt dans la semaine, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin avait dit ce jeudi sur RMC ne pas exclure la possibilité d'interdire ces manifestations. Mais à l'heure d'écrire ces lignes, aucun de ces rassemblements n'avait été interdit. Il y aura donc bien près de 120 rassemblements en France ce samedi.
Si de nombreuses associations, mais aussi des partis politiques de gauche comme la France Insoumise et EELV ont accepté de participer à ces "marches unitaires", d'autres comme le Parti socialiste ont refusé de s'afficher parmi les manifestants car ils ne sont notamment pas d’accord avec l’idée que le racisme est systémique dans les rangs de la police.
Ils se disent aussi mal à l'aise avec le slogan qui devrait à nouveau retentir dans les rues ce samedi : "tout le monde déteste la police". Ces revendications, Matthieu Valet les a exprimées dans la Matinale Weekend, en affirmant que cela faisait "mal pour notre démocratie et ceux qui la protègent".
"On encadre toutes les manifestations"
Pour autant, est–ce une raison pour que les policiers puissent exercer un droit de retrait afin de ne pas encadrer ces manifestations anti-police? "Non, on est des policiers républicains et on encadre toutes les manifestations si elles ne sont pas interdites", répond Matthieu Valet, qui assure que "même si l'on n'est pas d'accord avec les messages que véhiculent les manifestations, il faut bien que l'on protège sur le parcours les commerçants, les touristes, les habitants, les résidents qui n'ont rien demandé".
Côté manifestants, on demande notamment l’abrogation de la loi de 2017, connue sous le nom de loi Cazeneuve, qui assouplit les règles concernant l’usage des armes à feu par les forces de l’ordre, notamment dans les situations de refus d’obtempérer.
Les organisateurs des marches demandent également une réforme en profondeur de la police, son armement et ses méthodes d’intervention, notamment décriées par l'avocat spécialiste des violences policières Arié Alimi. Plus tôt cette semaine, il avait déploré le "monopole de la violence légitime" qui installerait la police dans "une légitimité" à chaque fois "que les policiers vont user de la violence".
Des enquêtes en hausse, des tirs lors de refus d'obtempérer en baisse
Mais ces termes sont radicalement réfutés par Matthieu Valet, le porte-parole du SICP, qui estime qu'il "n'y a pas de violences policières dans notre pays".
"C'est la violence des voyous qui oblige les policiers à utiliser la force pour nous protéger", a rétorqué Matthieu Valet, porte-parole du Syndicat indépendant des commissaires de police.
Hasard du calendrier, l'IGPN, la police des polices, vient de publier son rapport annuel : le nombre d'enquêtes menées par l'inspection générale sur l'usage de la force des policiers sur la voie publique est en nette hausse en 2022.
Toujours selon ce rapport, 38 personnes sont mortes à la suite d'une action de police, dont 22 après un tir. Et sur ces 22 décès, 13 sont liés à un refus d'obtempérer. Mais, il faut le souligner, les tirs lors des refus d'obtempérer sont en recul et atteignent même leur niveau le plus faible depuis 2017... année d'entrée en vigueur de cette fameuse loi Cazeneuve.