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Crimes sexuels sur mineurs: "On a bâillonné les victimes", estime la psychiatre Muriel Salmona

Muriel Samona, psychiatre et présidente de l’association "Mémoire traumatique et victimologie", milite pour la création d'un seuil d’âge de non-consentement à 15 ans et l’imprescriptibilité des crimes sexuels commis sur les enfants. Avant d’être reçue par le ministre de la Justice Eric Dupont-Moretti, elle était l’invitée de la matinale de RMC mardi.

Dans le cadre de la consultation menée par le gouvernement sur le sujet des enfants victimes de violences sexuelles et d’inceste, la psychiatre Muriel Salmona doit être reçue par le ministre de la Justice Eric Dupont-Moretti.

"J’aimerais qu’il y ait une sorte de constat de l’échec total de presque toutes les institutions pour prévenir les violences, protéger les victimes, les prendre en charge et punir les auteurs", a-t-elle lancé mardi dans la matinale de RMC. "On a bâillonné les victimes", a insisté la présidente de l’association "Mémoire traumatique et victimologie".

Elle dénonce le déni de la justice: "On n’a pas voulu voir l’ampleur de cette situation, le nombre d’enfants qui subissaient ces violences avec des conséquences à long terme sur leur vie". Alors Muriel Salmona demande à ce que les lois soient "adaptées à cette réalité et à la situation extrêmement préoccupante".

74% des plaintes sont classées sans suite

Muriel Salmona milite pour deux évolutions : que les crimes sexuels sur mineurs soient désormais imprescriptibles et que le seuil de non-consentement passe de 13 à 15 ans. "On demande à ce que ce soit 18 ans en cas d’inceste, de personnes ayant autorité, de situation de grande vulnérabilité comme un handicap", a-t-elle précisé.

Quant à l’imprescriptibilité, Muriel Salmona estime que c’est "le seul moyen de rendre justice à toutes ces personnes qui ont été bâillonnées pendant tant d’années". Mais quand les victimes portent plainte de nombreuses années plus tard, difficile de prouver les faits. "C’est à la justice de s’adapter pour faire des enquêtes de qualité", tranche la psychiatre. Aujourd’hui, 74% des plaintes sont classées sans suite.

"Cela peut arriver à n’importe quel enfant"

Pour prévenir de ces violences, Muriel Salmona demande un dépistage systématique, en primaire et au collège, et que les bonnes questions soient posées aux enfants. "Il faut savoir que ça peut arriver à n’importe quel enfant. Il faut que les médecins soient en première ligne, qu’ils soient formés et qu’ils s’engagent. Il faut ensuite que ça suive au niveau des soins et de la justice", a-t-elle continué.

L'exécutif semble plutôt réticent à rendre les crimes sexuels sur mineurs "imprescriptibles". Une notion réservée jusqu’alors aux crimes contre l'humanité. Depuis la loi Schiappa de 2018, une victime a jusqu'à ses 48 ans pour déposer plainte. En revanche, le gouvernement réfléchit bien à l'instauration d'un âge de non-consentement. Emmanuel Macron a lui demandé une "adaptation de la loi".

Léa Leostic