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EN VIDÉO - "On ne peut pas mourir à 6 ans": le témoignage vibrant de Mohamed Bouhafsi contre les violences familiales

Ancien enfant battu, Mohamed Bouhafsi, rédacteur en chef Football à RMC Sport et BFMTV, a publié une tribune pour s'interposer contre les violences familiales. Il était l'invité de RMC lundi matin.

C'est un témoignage vibrant. "Des enfants meurent aujourd'hui, il faut intervenir. Le confinement entraîne des drames. On ne peut pas laisser passer ça": ancien enfant battu, Mohamed Bouhafsi, rédacteur en chef Football à RMC Sport et BFMTV, a publié une tribune, dimanche, dans le Journal du Dimanche, "J'ai été un enfant battu. Interposez-vous, n'ayez pas peur d'agir". 

Le journaliste, que les auditeurs de RMC connaissent bien, avec ses infos exclusives sur les coulisses du monde du football dans l'émission "Breaking Foot", dévoile ainsi son passé d'enfant maltraité, rendant hommage à sa mère, également battue. Par ce témoignage, il souhaite que la parole se libère autour des violences familiales, indiquant que "chacun peut agir, s'interposer contre ces violences". 

"Il y a des événements qu’en temps normal je n’aurais peut être jamais évoqué. Mais les temps ne sont pas normaux. Il me semblait important de m’exprimer. De demander avec toutes mes forces à ceux qui peuvent défendre et protéger de le faire" a-t-il indiqué sur Twitter, dimanche.

"Je ne connaissais pas la vie de Daoudja, pourtant, il a changé ma vie"

Mohamed Bouhafsi était l'invité de Jean-Jacques Bourdin, lundi matin, en direct: il s'est confié sans détour face à une vérité terrible, mais pourtant inconnue.

"Les têtes à têtes sont dangereux. On est reclus, enfermés dans un appartement, une maison. On n'a pas les sorties, les moments extérieurs pour s'aérer, se changer les idées. Le confinement peut engendrer des drames. Ce qui a entraîné cette tribune, c'est l'histoire de Daoudja, 6 ans, mort sous les coups de son père à Aubervilliers, car il n’arrivait pas à faire ses devoirs. Aujourd'hui, est-ce qu'on peut mourir parce qu'on n'arrive pas à faire des exercices? On ne peut pas mourir à 6 ans. C'est intolérable. Ca a réveillé des souvenirs très douloureux chez moi, des moments que je voulais occulter. Je ne connaissais pas la vie de Daoudja, pourtant, il a changé ma vie. A l'annonce de sa mort, j'ai pris mon stylo et j'ai voulu écrire ce que je ressentais, sans rancune, sans haine. Ecrire pour que les gens puissent réagir. Ecrire pour ma mère, aussi. Je ne voulais pas parler de mon père car je voulais garder les moments de bonheur, de joie que j'ai eu avec ma mère" confie-t-il. 

"Des enfants meurent à côté de chez nous, et on ne fait absolument rien"

Alors que les violences intrafamiliales ont bondi de plus de 40% pendant le confinement, Mohamed Bouhafsi rappelle qu'il est important de parler, "de s'interposer". Encore plus en cette période: la hausse des signalements de maltraitance envers les enfants est surtout notable à partir de la deuxième semaine de confinement (+15% par rapport à la première), et encore plus à partir de la troisième (+53% par rapport à la première). 

"Je veux montrer aux gens qu'il faut s'interposer. On parle beaucoup des gestes barrières aujourd'hui. Et bien, un simple "geste barrière" pour un enfant peut le sauver. On est là, on est de passage, on se dit que les cris vont passer... Non, ce n'est pas un moment. Des enfants vont mourir. Il faut intervenir. Moi, j'ai eu la chance d'avoir des voisins, à Saint-Denis, qui sont intervenus: en frappant à la porte, en me faisant à manger, en me faisant jouer avec leur fille. Ca a été extrêmement important. On peut réagir: l'ouverture d'une porte par un voisin peut sauver un enfant. Un pharmacien qui voit une femme qui tremble, avec un oeil au beurre noir, peut sauver un enfant. Ca ne se passe pas que dans les quartiers, pas que dans les grandes villes. Ca se passe aussi dans nos campagnes. Il faut réagir"

Face à Jean-Jacques Bourdin, Mohamed a confié avoir longtemps hésiter à parler de son passé. Mais il veut aujourd'hui s'investir contre cette violence quotidienne:

J'ai mis 27 ans à en parler. A un moment, on a une place à prendre, un rôle à jouer dans notre société: par ces simples gestes, on peut avoir un rôle. Des enfants meurent à côté de chez nous, et on ne fait absolument rien. On ne peut pas tracer son chemin quand on entend les cris d'un enfant. On ne peut pas mourir à 6 ans. On ne peut pas mourir à 9 ans. On ne peut pas mourir quand on est une femme battue et qu'on n'a pas de réponse. J'ai reçu pleins de commentaires hier qui me disait qu'enfin, la parole des gamins se libère. Si je peux faire réagir un enfant en se disant que ce n'est pas normal si son père lui donne une torgnole tous les deux ou trois jours, si je peux faire réagir un papa, qui m'aime bien, ce sera ma plus belle victoire. " a-t-il plaidé. 
La rédaction de RMC