RMC
Faits divers

A Nice, afficher les voleurs sur la vitrine des commerces, une pratique illégale mais assumée

placeholder video
Face à l'augmentation du nombre de vols, certains commerçants niçois ont décidé d'afficher les photos des voleurs sur leurs commerces. Une pratique pour faire fuir ces derniers, mais qui se révèle être illégale. En effet, elle va à l'inverse de la présomption d'innocence.

À Nice, en pleine saison estivale les clients affluent, et les vols aussi. En réaction, des commerçants affichent les coupables sur leurs vitrines. Une pratique qui se répand, mais qui est tout sauf légale.

Le parti-pris : Des commerçants affichent les voleurs sur leurs vitrines - 01/08
Le parti-pris : Des commerçants affichent les voleurs sur leurs vitrines - 01/08
4:44

Une façon pour eux de les dissuader de revenir voler ou de prévenir les autres commerçants de la présence de voleurs dans leur quartier. Depuis un mois, les cintres de cette boutique se vident comme par magie. Alors Cathy regarde les vidéos de surveillance du magasin et s'aperçoit que plusieurs voleuses y sévissent. “Elles ont des grandes tuniques, elles cachent des choses en dessous, où dans des grands paniers”, décrit-elle.

Elle décide alors d’afficher des photos de ces voleuses sur sa vitrine.

“En mettant ces pancartes, j’espère vraiment qu’elles ne vont pas venir parce qu’on est super vigilant. On est sur le qui-vive”, assure-t-elle.

Au-dessus de ces photos, est écrit en rouge “alertes voleuses - vigilance renforcée”. Une affiche qui ne manque pas de faire réagir les passants. “Ça donne moins envie aux autres de venir voler dans les boutiques”, indique une cliente. “Ça me pose question. Est-ce que c’est vraiment le rôle des commerçants d’afficher des personnes qui commettent des infractions dans leurs établissements”, se demande en revanche une passante.

Un an de prison encouru

A Nice, cette boutique n’est pas la seule à avoir recours à ces affichages, il y a quelques semaines une librairie du centre-ville avait également affiché ces photos sur ce qui était appelé, le “mur de la honte”. Christophe, lui, tient une cave-épicerie fine. Il assume pleinement ce type de pratique.

"Il y a un moment, c’est le trop qui fait déborder. On est usé parce que vous avez des personnes qui viennent, qui se servent dans votre magasin, qui partent et qui pensent que tout est normal. Et en plus, elles viennent régulièrement, elles nous regardent en face. On a eu un cas de vol où on a fait venir la police, ils ont regardé les images. Ils ont retrouvé les personnes 800 mètres plus loin. Sauf que comme ils n’ont pas d’argent, pas de papiers et ne parlent pas souvent français, il ne se passe rien et le lendemain, ils repassent. Donc qu’est-ce qu’on doit faire nous?”, dénonce-t-il.    

Et pourtant ce n'est effectivement pas leur rôle. C’est même interdit comme l’explique maître Dylan Slama, avocat pénaliste au barreau de Paris. “Ce n’est pas seulement une question de droit à la vie privée, mais d’abord parce que ça va à l’encontre de la présomption d'innocence. En cas de violation des règles concernant et la vie privée, et la présomption d'innocence, on encourt jusqu'à un an de prison et 45.000 euros d’amende”, affirme-t-il.

Siam Spencer avec Guillaume Descours