RMC
Faits divers

Mort de Jean-Pierre Maldera près de Grenoble: "Un signal mortel" envoyé "aux anciens"

placeholder video
La mort de l'un des "parrains" de la mafia italo-grenobloise mercredi, sur une autoroute près de Grenoble, est un "signal mortel donné aux anciens," estime ce jeudi sur RMC le journaliste Frédéric Ploquin, spécialiste du grand banditisme.

Jean-Pierre Maldera, l'un des "parrains" de la mafia italo-grenobloise, a été tué mercredi sur une autoroute près de Grenoble. Les auteurs de la fusillade sont toujours en fuite. L'homme est mort à l'âge de 71 ans, dix ans après la mystérieuse disparition de son frère aîné Robert Maldera.

"Le nom des Maldera raisonne dans la région grenobloise, comme Francis Le Belge à Marseille", contextualise sur RMC le journaliste Fréderic Ploquin, spécialiste du grand banditisme, coauteur avec Jean-Louis Rizza du livre Braqueur, mercenaire, aventurier, qui sortira le 26 mars prochain.

"Changement d'ère"

"Robert et Jean-Pierre Maldera ont grandi dans un quartier de Grenoble, un chaudron du trafic de stupéfiants. Ils sont nés en 1953 et 1959. À travers eux, on voit défiler toute l'histoire du grand banditisme et de la mafia grenobloise", explique-t-il.

En ce qui concerne Robert Maldera, disparu en 2015, "j'avais cru comprendre que c'était une disparition accidentelle plutôt qu'un règlement de comptes. Il n'y a pas eu de riposte, il n'a pas été "vengé" et il n'est jamais réapparu. La piste privilégiée est un accident, une erreur de ciblage", affirme Frédéric Ploquin.

Le choix d'Apolline : Frédéric Ploquin - 13/03
Le choix d'Apolline : Frédéric Ploquin - 13/03
8:25

"Est-ce qu'il a mis la main dans la drogue?"

La mort de Jean-Pierre Maldera, mercredi, s'avère par contre être "un tournant". "Quand vous tuez le dernier dinosaure, vous changez d'ère", poursuit le journaliste, qui s'interroge sur les raisons de ce qu'il pense être un assassinat. "Qu'est qu'il s'est passé? Il ne se reconnaissait absolument pas dans le trafic de shit et de cocaïne, il a peut-être mis la main là où il ne fallait pas, est-ce qu'il a mis la main dans la drogue"? Il avait rencontré l'un d'eux en 2007, affirmant au journaliste qu'ils ne "touchaient pas à la came".

Connu pour avoir trempé dans des affaires de proxénétisme, racket, attaque à main armée, Jean-Pierre Maldera avait un casier judiciaire avec "huit" condamnations prononcées entre 1978 et 1999, selon le procureur adjoint de Grenoble. L'homme, qui a notamment été condamné par la cour d’assises de l’Isère en 1986 à 15 ans de réclusion criminelle pour un vol à main armée, n'avait pas fait parler de lui depuis plus de vingt ans.

Sa mort semble être un "signal" envoyé par la nouvelle généation. "Il a du mettre un non, s'opposer à quelqu'un. C'est la piste la plus cohérente", avance-t-il. "C'est un signal donné aux anciens, un signal mortel. 'Vous les vieux, vous n'avez plus votre place à Grenoble. Ce n'est pas parce que tu t'appelles Maldera que tu ne peux pas mourir'."

"La mafia est implantée à Grenoble depuis les années 70, c'est l'équivalent de la French connection à Marseille. Il y a un passé, des racines à toute cette violence et à tout ce mal. Cela ne surgit pas comme ça à l'inverse d'autres villes comme Rennes", estime Frédéric Ploquin

"Chaque génération à Grenoble s'avère un petit plus violente" mais déjà en 1996, un rapport de la PJ évoquait le milieu grenoblois qui se distingue par "sa violence meurtrière", rappelle le journaliste, qui compare Grenoble à Marseille. "Grenoble c'est un petit Marseille. Le laboratoire de la criminalité organisée contemporaine qu'est Marseille a un appendice qui s'appelle Grenoble."

La préfète évoque le "fleau du narcotrafic"

L'enquête pour "meurtre en bande organisée" est désormais supervisée par la Juridiction interrégionale spécialisée dans la lutte contre la criminalité organisée (Jirs) de Lyon, selon le procureur adjoint de Grenoble, Touret de Coucy, qui n'avance par ailleurs aucun mobile.

En revanche, la préfète de l'Isère semble relier le meurtre au trafic de stupéfiants: "La guerre contre le fléau du narcotrafic sera longue et difficile. Mais nous la gagnerons", a-t-elle écrit, alors que Grenoble et sa banlieue sont particulièrement touchées par le trafic de drogues, avec des violences récurrentes par armes à feu.

Léo Manson