Gérald Darmanin veut publier les chiffres de la délinquance chaque mois: est-ce vraiment utile?
L'intérêt est évident pour Gérald Darmanin. Tous les premiers vendredi du mois, il tiendra une conférence de presse pour détailler les résultats. Il pourra montrer régulièrement que la lutte contre la violence et la délinquance est une priorité du gouvernement.
C’est aussi une réponse à Marine Le Pen qui a donné dimanche le thème de sa future campagne présidentielle: fustiger l’inaction du gouvernement. Une réponse aussi aux leaders des Républicains comme Xavier Bertrand qui estime que la sécurité est "l’immense faillite du quinquennat".
Des chiffres déjà publiés... tous les mois
Gerald Darmanin riposte donc en annonçant la publication mensuele des chiffres. Ce n'est pas nouveau comme méthode. Les chiffres que le ministre de l’Interieur donnera une fois par mois, étaient jusqu'à présent publiés... une fois par mois.
Les homicides, les vols avec violences, les escroqueries, les cambriolages, les violences sexuelles... Toutes ces données sont publiées par le ministère de l'Intérieur et son organisme "Interstats". Les chiffres du mois d’août sont par exemple déjà en ligne. La nouveauté ce sera donc principale la conférence de presse.
Gérald Darmanin donnera les chiffres dans sept domaines. D'abord tous les chiffres concernant les stupéfiants. C’est sa priorité. Puis les violences conjugales et sexuelles, c’est la priorité de sa ministre déléguée Marlène Schiappa.
Gérald Darmanin veut mettre du bleu dans la rue
Ensuite, il donnera les statistiques du nombre d’heures de patrouille des policiers et des gendarmes sur la voie publique et dans les transports en commun. Et ça, c’est nouveau. Et l’on va s'apercevoir que 4% des policiers sont dans la rue a un moment T.
Gérald Darmanin veut mettre du bleu dans la rue. Et la publication de cette donnée va mettre la pression sur les policiers pour sortir plus.
6e domaine dont les chiffres seront rendus publics: les dérives sectaires. Là, on ne sait pas exactement de quoi on parle. Enfin, 7e domaine sur lequel le ministère compte communiquer tous les mois: les chiffres de l’immigration et du droit d’asile. Qui sont donc associés à ceux de la délinquance.
Pas une politique "du chiffre" selon Darmanin mais "du résultat"
Gérald Darmanin se rallie à ce que l’on avait appelé la politique du chiffre, mais, lui, préfère l’expression de "politique du résultat". Il explique dans Le Parisien ce lundi matin que la France est "malade" et que lorsqu'on est malade "on a besoin d’un thermomètre".
L'inspiration est clairement sarkoziste. Dés son arrivé place Beauvau en 2002, Nicolas Sarkozy avait établi un classement des préfets en fonction de leur résultats. Les 5 meilleurs étaient récompensés, les 5 derniers étaient vilipendés. On appelait ça le "sarko-mètre". Mais Nicolas Sarkozy lui-même y avait assez vite renoncé.
Les chiffres du ministère biaisés?
Le paradoxe, c’est qu'effectivement, il est intéressant de connaître les chiffres. Ceux du ministère qui sont les chiffres des plaintes. Ce sont des résultats biaisés.
Par exemple: on estime que près de 100 % cambriolages des cambriolages font l’objet d’une plainte, parce que l’on en a besoin pour l’assurance. En revanche, toutes les violences sexuelles ou intra-familiales ne font pas l’objet de plaintes.
Pour connaître la réalité de la délinquance, il faut donc les associer aux enquêtes de victimisation. Qui sont des supers sondages, faits par “L’observatoire national de la délinquance et des réponses pénales”, dirigé par Christophe Soulez. Sauf que cet organisme public rattaché à Matignon va être dissous à la fin de cette année.
On va donc communiquer davantage sur des chiffres, mais on aura en réalité moins de chiffres. Et en tout cas un thermomètre en moins.