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"La question s’est posée": agressé comme à Tourcoing, ce policier raconte pourquoi il n’a pas sorti son arme

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Mathieu, policier dans le Val-d'Oise, raconte aux Grandes Gueules comment il a été agressé par plusieurs individus comme à Tourcoing lorsqu'il était en service. Son agresseur a été libéré et nargue, selon lui, ses collègues. "À six contre quarante, la question s’est posée de sortir l’arme."

L’affaire de l’agression d’un policier de la BAC de Tourcoing (Nord), roué de coups jeudi dernier lors d’une intervention pour un vol de trottinette, continue de provoquer la colère dans les rangs policiers.

Cinq adolescents ont été mis en examen, selon la procureure de Lille, mais tous ont été remis en liberté sous contrôle judiciaire strict.

"À six contre quarante, la question s’est posée de sortir l’arme"

Mathieu, policier dans le Val-d’Oise, raconte ce jeudi sur RMC avoir été victime d’une agression similaire. "J’ai été victime d’une situation comparable à Tourcoing, lors d’un contrôle d’identité dans une cité sensible où il y avait du trafic de stupéfiants. On contrôlait un individu bien connu des services. Ça s’est mal déroulé : on s’est retrouvés à six contre quarante individus. J’ai pris dix jours d’ITT", témoigne-t-il au micro des Grandes Gueules.

L'un des agresseurs, un jeune majeur déjà connu depuis plusieurs années, n’a pas été incarcéré. "Il a fait un jour de détention provisoire avant son jugement, puis a pris une peine sous bracelet électronique… qu’il n’a toujours pas, car les rendez-vous avec l’administration sont longs", raconte le fonctionnaire, amer.

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Aujourd’hui encore, l'individu peut être aperçu dans le quartier : "Il fait ses emplettes, il défie mes collègues. Quand on le croise, il nous dit clairement que c’est nous qui avons tort et qu’il n’a rien à se reprocher. Tous mes collègues le voient, assis sur un banc, avec une attitude hautaine. Ça fout les boules."

Mathieu confie avoir songé à dégainer son arme ce jour-là. "On s’est posé la question. Mais on s’est dit: si on tire en l’air, c’est nous qui allons finir en détention provisoire. C’est toujours le même problème: le juge décidera ensuite de nous mettre en prison ou pas. La justice est clairement du côté des délinquants plutôt que de la police", dénonce le policier.

"Les narcotrafiquants recrutent des mineurs car ils savent qu'ils ressortent rapidement", regrette Abel Boyi, éducateur. "C'est un message catastrophique"

Pour Abel Boyi, éducateur et président de l'association "Tous uniques, tous unis", la décision de remise en liberté dans l’affaire de Tourcoing envoie un signal dramatique : "Tous ces narcotrafiquants adorent recruter des mineurs ou de jeunes adultes, car ils savent qu’en cas d’arrestation, ils ressortent rapidement. C’est porte ouverte. Ce type de cas arrive tous les jours, mais là, la France attendait une peine exemplaire. Au contraire, c’est un message catastrophique envoyé aux jeunes et aux trafiquants. Après, on s’étonne qu’ils aient ce sentiment d’impunité qui les pousse vers la délinquance."

"La loi est obsolète", dénonce Gérald Darmanin

Selon Le Figaro, trois suspects majeurs avaient déjà été libérés à l’issue de leur garde à vue. Les deux derniers, présentés mercredi soir devant le juge des libertés et de la détention, ont été placés sous contrôle judiciaire. Une situation dénoncée par Charles Consigny, avocat, qui parle de "laxisme de la part de la magistrate" et estime qu’"une scène insupportable qui a choqué toute la France méritait des sanctions exemplaires".

Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a dit "comprendre l’incompréhension d’un certain nombre de policiers" et appelé à "une justice la plus ferme possible". De son côté, Gérald Darmanin a réagi sur le réseau social X : "La remise en liberté si rapide de voyous à Tourcoing n’est plus possible. La loi, obsolète et plus à la hauteur de la violence de la société, doit être changée", plaidant pour des peines minimales de prison ferme et immédiates.

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