Les commissariats de police complètement noyés sous les plaintes: ce que dit un rapport inquiétant

Les commissariats débordent de plaintes. Il y en a partout, dans les placards, dans les caves, dans les tiroirs, sur les bureaux… Et concernant tous les sujets: cambriolages, agressions, violences intrafamiliales, délinquance financière…
D’après le rapport d’inspection que RMC a pu consulter, l’année dernière, les commissariats partaient déjà avec un stock ancien de 2,7 millions de plaintes. Un tiers d’entre elles sont en stock depuis plus de deux ans. Et ce n’est pas tout, il faut ajouter 3,5 millions de nouvelles plaintes. Des procédures enregistrées dans le courant de l’année.
Le constat est clair, les fonctionnaires de police sont noyés. En moyenne, un policier est amené à traiter 180 dossiers par an et ça peut même aller jusqu’à 800 pour les enquêteurs les plus spécialisés.
Comment expliquer cette montagne de plaintes ?
D’abord, il y a une inflation des lois. Plus il y a des règles, plus il faut les respecter, et c'est mécanique, plus il y a d'infractions. Ensuite, il y a le fait de faciliter les dépôts de plainte en ligne, en quelques clics, ça augmente le stock.
Et puis enfin, c’est une question d’effectifs et d’expérience des enquêteurs. Il arrive souvent que dans certains services judiciaires, les policiers soient jeunes, peu formés aux procédures. Ils ont donc encore plus de mal à absorber le flux de plaintes et ils se concentrent d'ailleurs sur les cas les plus simples et rapides.
Des victimes négligées?
C’est aussi un des effets pervers du “plus de bleu dans rue” du gouvernement. En mettant plus de policiers sur le terrain, il y en a moins dans les bureaux pour traiter les dossiers. La réforme de la police de Gérald Darmanin doit compenser ce manque. La fusion de la police judiciaire et de la sécurité publique, qui gère la délinquance du quotidien, a pour objectif de résorber le stock d’affaires en cours. Sauf qu’avec moins d’enquêteurs spécialisés, certains craignent de voir les dossiers les plus compliqués passer à l’as. Notamment dans les affaires de fraude fiscale.
Cette saturation de plaintes, ça n’est pas sans conséquences. Certaines victimes sont négligées. La confiance des Français en la police et en la justice en pâtit. Et puis forcément, ce sont des délinquants qui restent impunis. Dans le rapport, il est écrit noir sur blanc, et même en gras que, “des dossiers portant sur des faits graves dorment dans certains services sans avoir fait l’objet d’investigation alors même que les auteurs présumés ont été identifiés”.
Alors pour éviter cela et limiter la saturation dans les commissariats, le rapport fait des recommandations. Il y en a 17 en tout. La priorité numéro 1, c’est le renforcement des troupes. Une hausse d’au moins 10% des effectifs dans les services d’investigation. C’est le minimum syndical pour tout juste éviter une inflation des stocks de plaintes.
Le rapport recommande aussi d'élargir les compétences de la police nationale pour qu’elle puisse constater un panel plus large d’infractions. Et puis on préconise aussi de limiter les dépôts de plainte qui ont pour seul objectif de toucher une indemnisation. Arrêter en somme de déposer plainte pour un oui ou pour un non. C’est un peu comme lorsqu’on demande d’éviter les services d’urgence lorsqu’il n’y a pas d’urgence.
Preuve de l’ampleur du phénomène, le rapport explique que si l’on ne fait rien, si aucune mesure correctrice est prise et que la délinquance reste équivalente à aujourd’hui, le stock de procédures pourrait encore augmenter et en 2030, ce seront alors 3,5 millions de plaintes qui rempliront les placards des commissariats.