"On peut être radicalisé et ne pas passer à l’acte": de la difficulté de détecter les éventuels auteurs d’attaques terroristes
Plus d'une semaine après l'attaque de la préfecture de police qui a fait quatre morts, la justice continue son enquête sur le suspect, un fonctionnaire de catégorie C, employé de la préfecture et "habilité secret-défense". Si le parquet anti-terroriste a été saisi de l'affaire, la radicalisation du suspect, converti à l'islam il y a une dizaine d'années, n'est toujours pas avérée.
À la suite de l'attaque, le président de la République Emmanuel Macron a appelé à la vigilance tandis que le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner a évoqué les "signes de radicalisation" qui nécessitaient des signalements hiérarchiques dans la fonction publique. Peu après la tuerie, des sources policières avaient évoqué "des signaux faibles", qui auraient pu laisser penser à une radicalisation du suspect.
"La difficulté est déjà dans la définition des mots"
Mais si ces "signaux faibles", dévoilé par un rapport de la Direction du rassemblement de la Préfecture de police (DRPP), avait fait l'objet d'une enquête administrative, auraient-ils pour autant permis d'empêcher tout passage à l'acte ? Pas si sûr estime Béatrice Brugère, ancienne juge antiterroriste, aujourd'hui vice-procureur de Paris.
"La difficulté est déjà dans la définition des mots (...) L’islamisme radical c’est une chose, le terrorisme s’en est une autre : On peut être radicalisé et ne pas passer à l'acte ! La violence est un mode d'action pour faire avancer cette idéologie et elle a un nom : le jihadisme", a tenu à expliquer la magistrate ce vendredi dans "Les Grandes Gueules" sur RMC.
"On a un arsenal plutôt complet"
"Il faut s’accorder sur ce qu’on doit détecter. Une fois qu’on l’a détecté, il faut l’analyser correctement et c’est le travail du renseignement, qui traites les informations", a précisé Béatrice Brugère, avant de balayer les accusations de justice trop "faible" face au terrorisme.
"C'est l'usage du droit qui est en fait qui peut être faible. On a un arsenal plutôt complet. On l'utilise et on va jusqu'au bout. Il faut que la société et les journalistes notamment passent au crible la réalité et l'efficacité de ces mesures", a défendu la vice-procureur de Paris.
Auditionné par les sénateurs de la commission des Lois, le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner, a assuré qu'il considérait "de la responsabilité d'un policier oui d'un gendarme d'assumer la dénonciation d'un phénomène de radicalisation constatée". Plus tôt devant l'Assemblée nationale, il avait évoqué plusieurs signes de radicalisation comme le port de la barbe ou le refus de serrer la main à une femme.