Prise d'otages et fusillade au Bataclan: comment la BRI a réellement mené l'assaut

Pendant 2h38, de 21h40 à 00h18, dans la nuit de vendredi à samedi dernier, les spectateurs du Bataclan vont vivre un véritable enfer. Une fusillade et une prise d'otages éclate dans cette salle de concerts du XI arrondissement de Paris. Mais le récit de ces événements diverge selon les personnes interrogées. Certains témoins ont dit que les terroristes n’avaient cessé de tirer sur la foule. En réalité, il s’est passé deux heures sans qu’aucun coup de feu ne soit tiré à l’intérieur. C'est en tout cas ce que nous indique Pascal (le prénom a été modifié, ndlr), un policier de la BRI ayant participé à l'assaut.
Ils enjambent des corps, marchent dans du sang
Quand il arrive sur place il est 22h15 et un terroriste est déjà mort. Les policiers de de la direction de la sécurité publique de l'agglomération parisienne sont les premiers à intervenir. Ils essuient plusieurs coups de feu, visés par un des kamikazes qui se trouve à l'entrée du Bataclan. Celui-ci rentre ensuite à l'intérieur de la salle de spectacle. Ensuite, c'est un commissaire aguerri de la BAC de Paris qui entre à son tour avec des équipiers. Il vise un terroriste présent sur la scène, le touche, l'homme tombe et il explose.
Pendant ce temps, Pascal avec 15 autres hommes de la BRI arrivent sur place. Pascal fait partie du groupe de permanence qui est passé au 36 quai des Orfèvres pour prendre le matériel blindé. Cette première équipe entre à son tour dans le Bataclan. Il fait noir, il n’y a aucun bruit. Pascal et les autres policiers enjambent des corps, marchent dans des flaques de sang. A ce moment-là, ils ne savent pas que deux autres terroristes sont encore là, à l’étage, où ils retiennent une vingtaine de personnes en otage.
"N'approchez pas"
"Si on avait entendu des coups de feu, on serait immédiatement intervenus. On est formés pour ça" explique Pascal. Pendant une heure, les hommes de la BRI inspectent le rez-de-chaussée. A chaque fois qu'ils passent un angle, qu'ils ouvrent une porte, Pascal et ses collègues trouvent des survivants, les rassurent, vérifient que ce ne sont pas des terroristes et les évacuent. Ce qui prend beaucoup de temps… Entretemps, d'autres équipes les ont rejoints.
A 23h15, quarante policiers sont à l'étage. Devant une porte, un otage crie "N'approchez pas, on est avec deux terroristes qui vont nous tuer". S'en suit 12 minutes de discussions à travers la porte. Puis, un négociateur de la BRI entre en contact direct avec un des assaillants. Il y aura cinq appels pour essayer d'obtenir la libération des otages. En vain.
La BRI encaisse une trentaine de balles sur son bouclier
A 00h18, la première colonne de la BRI donne l'assaut. Derrière elle, une seconde est prête à intervenir si les membres de la première se font tuer. Les policiers ouvrent la porte, les terroristes tirent dans leur direction. La BRI ne réplique pas. Elle encaisse une trentaine d'impacts sur son bouclier de défense et met les otages à l'abri derrière.
Pascal et ses collègues se retrouvent seuls face aux terroristes et leur lancent des grenades. Mais le bouclier bascule en avant et les deux premiers hommes de la colonne se retrouvent à découvert. Ils voient une ombre qui passe devant eux, ils tirent dans cette direction. Un terroriste s'effondre, il explose et l'autre kamikaze saute également. Tous les terroristes sont donc neutralisés et aucun otage n'a été blessé pendant cette intervention.
"Ce sont des héros"
Une mise au point des événements qui réjouit ce mercredi Nicolas Comte, secrétaire général adjoint du syndicat Unité SGP-Police FO: "J'ai entendu tellement de choses erronées au sujet de cette intervention, notamment sur les hommes de la BRI. C'est terrible ce qui est arrivé mais j'ai rencontré des collègues de la BRI hier et je crois qu'il faut vraiment saluer leur courage car ils ont traversé l'enfer".
"Ils ont en effet mené un assaut compliqué. Ils ont fait en sorte qu'il n'y est pas d'otages tués, rappelle-t-il. Il y a 27 impacts de balles sur le bouclier derrière lequel ils étaient protégés. Je crois donc qu'ils méritent d'être salués. Il ne faut pas faire de polémique inutile les concernant. Ce sont des héros".
"Il y a aussi une très grosse injustice que l'on espère bientôt voir réparée, poursuit-il. Il faut savoir que le Raid pour ses missions a une prime spécifique et c'est bien normal. Mais, les membres de la BRI, eux, parce qu'ils appartiennent à la préfecture de police, n'ont pas droit à une telle prime. Une telle inégalité est absolument scandaleuse".