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Procès de la rue d'Aubagne: "Sous considération budgétaire, on a sacrifié la vie des victimes"

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À quatre jours du procès de la rue d'Aubagne, où deux immeubles s'étaient effrondés le 5 novembre 2018 à Marseille faisant huit morts, une marche contre l'habitat indigne y est organisée ce dimanche. Kévin Vacher, membre du collectif du 5 novembre, attend une "exemplarité des peines", tandis qu'un avocat d'une partie civile dénonce l'inaction du syndic.

Le 5 novembre 2018, deux immeubles de la rue d'Aubagne, à Marseille, s'effondraient provoquant la mort de huit personnes. Une marche est organisée ce dimanche après-midi dans la cité phocéenne afin de protester contre l'habitat indigne, à quatre jours de l'ouverture du procès. "On attend l'exemplarité des peines et de la dignité des prévenus", a déclaré au micro d'Anaïs Matin, sur RMC, Kévin Vacher, membre du collectif du 5 novembre.

Le procès qui doit durer six semaines, jusqu'au 18 décembre, fait comparaître à la barre six personnes physiques - dont Julien Ruas, adjoint au maire chargé de la prévention et de la gestion des risques, alors que la ville était encore dirigée par Jean-Claude Gaudin (LR) et Richard Carta, l'architecte désigné comme expert par le tribunal administratif de Marseille - ainsi que deux sociétés à savoir le cabinet de syndic Liautard et Marseille Habitat.

"La banalité du mal"

Pour Kévin Vacher, ces prévenus sont des "acteurs de l'habitat indigne", que l'on peut retrouver "assez couramment" et ce partout en France. "Ce ne sont pas des marchands de sommeil ou des criminels. C'est le quotidien et la banalité du mal", a-t-il asséné.

"On a les mails des locataires qui supplient le syndic en disant: 'Qu'est-ce que vous pouvez faire, ça va s'écrouler, mon plafond s'affaisse, il y a des fissures dans les murs'. On a dit à ces locataires le 18 octobre 'pas de problèmes, vous pouvez rester dans ces appartements'. 15 jours après, tout s'écroule. Sous considération budgétaire, on a sacrifié la sécurité et la vie des victimes", a déploré auprès de RMC David Metaxas, avocat du frère d'une victime qui s'est constitué partie civile pour le procès.

L'invité du jour : Kevin Vacher - 03/11
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L'expert avait inspecté le 65 rue d'Aubagne sans interroger aucun habitant

Richard Carta avait inspecté l'immeuble du 65 rue d'Aubagne, où vivaient les huit victimes, trois semaines à peine avant le drame, une visite qu'il avait menée en une heure, sans interroger aucun habitant.

"Le drame n'a fait que révéler une situation qui couvait depuis très longtemps. Une bonne partie des immeubles du quartier avaient déjà identifiés comme dégradés et avaient été évacués", a-t-il rappelé. Six ans plus tard, ce sont en tout "8.000 personnes" qui ont quitté leur logement. "Ça continue tous les mois avec deux ou trois évacuations". À Marseille, plus de 40.000 personnes vivent dans des taudis, selon la Fondation Abbé-Pierre.

"Faire peur" aux municipalités

Aussi, Kévin Vacher et le collectif du 5 novembre attendent du procès un moyen de "faire peur" aux municipalités". "Donner le signal qu'on peut arriver à des situations criminelles quand on laisse faire et qu'on ignore les habitants", expose-t-il. Avec ce drame, la Ville de Marseille assaillie de critiques n'avait pas eu d'autres choix que de finalement écouter les habitants et les victimes.

"On a imposé un document à la municipalité, qui protège les personnes victimes du mal logement dans des zones en péril. C'est un exemple de démocratie citoyenne très intéressant, où les gens font à la place des pouvoirs publics défaillants", a détaillé Kévin Vacher.

Contrôle technique des logements tous les 5 ans

Il indique désormais travailler avec son collectif sur un "plaidoyer législatif", avec l'idée de mettre en place "un contrôle technique des logements". Concrètement, une "entreprise spécialisée" pourrait venir vérifier les bâtis et les logements, afin de trovuer des traces d'insalubrité.

La situation politique actuelle et l'examen du projet de loi de finances 2025, dans lequel le gouvernement espère trouver 60 milliards d'euros dont 40 milliards de baisse de la dépense publique et 20 milliards de recettes, inquiète par ailleurs le collectif. "On est très inquiets du budget qui va être alloués sur les futures rénovations."

Léo Manson avec Clara Gabillet