Procès des viols de Mazan: l'affaire Pelicot attire et fascine la presse du monde entier

L’affaire des viols de Mazan, avec le courage de Gisèle Pelicot, émeut la France et attire aussi les journalistes du monde entier. Et quand nous avons appelé Catherine Porter du New York Times mercredi, elle a semblé surprise que nous lui demandions pourquoi elle s’est rendue au tribunal d’Avignon, et pourquoi les Américains s’intéressent à cette affaire.
"Il faudrait peut-être demander aux absents pourquoi ils ne sont pas là !", nous a-t-elle répondu.
C'est en effet un procès hors norme: 51 accusés, la soumission chimique de Gisèle Pélicot, une famille détruite par un homme, le box des accusés où l’on croise monsieur Tout-le-monde… L’affaire Pelicot est suivie en Allemagne, au Royaume-Uni, en Inde, en Malaisie, en Australie, au Mexique, au Qatar... "La France affronte l’horreur" pour ABC Espagne. "Le courage de la victime face à ses violeurs", pour Le Soir, en Belgique, "Le monstre d’Avignon" pour le Daily Mail, en Angleterre. Le tabloïd anglais a dépêché deux journalistes pour couvrir un procès "à couper le souffle".
"Ça touche à l’intime", "ça interroge la société"
Le regard international donne une autre dimension à l’affaire. Certains comparent la couverture de ce procès par la presse étrangère à celle du procès des attentats du 13 novembre 2015. Pour Enric Bonet, qui écrit pour les journaux espagnols El Correo et El Confidencial, "c’est presque étonnant". "Le fait de violer quelqu’un touche plus que le fait de tuer…", s’interroge-t-il.
Il a déjà publié plus sur cette affaire en deux semaines que sur le procès des attentats en 10 mois. "Ça touche à l’intime", "ça interroge la société", explique-t-il, "et il y a une part de sensationnalisme bien sûr".
Catherine Porter, du New York Times, nous a expliqué approcher du millier de commentaires sous ses articles. Les Américains lisent, partagent et commentent. Entre horreur et solidarité avec Gisèle Pelicot.
Le live-tweet de notre envoyée spéciale RMC Marion Dubreuil est traduit dans toutes les langues. Elle est suivie sur les réseaux par des confrères et consœurs du monde entier, ses dessins du procès sont choisis par des journaux allemands, espagnols…
Un autre regard sur notre justice et notre définition du viol
Les journalistes étrangers ne sont pas simplement venus raconter le procès et l’affaire. Ils nous interrogent, nous proposent un nouveau regard sur notre pays et notre justice.
Le débat sur la définition du viol en France, qui n’intègre pas la notion de consentement par exemple. L'Espagne a précisément changé sa loi en 2022. Le courage de Gisèle Pelicot qui choisit de faire de son drame une affaire médiatique. Le profil des accusés aussi, avec cette particularité française: certains se demandent pourquoi ce sont les visages des victimes qui apparaissent et pas celui des accusés. "Votre présomption d’innocence...", souffle-t-on.
Le Daily Mail a diffusé un article avec les 50 photos des 50 accusés, mais il n’est pas disponible en France, bloqué de ce côté de la Manche par crainte d’ennuis avec la justice française.
Notre consœur du New York Times a d’ailleurs été surprise de voir 18 personnes dans le box des accusés, ceux qui sont déjà en détention provisoire. "Les autres sont autour de nous, dans la salle. Mêlés aux spectateurs, aux avocats. C’est quelque chose que je n’ai jamais vu", explique-t-elle.
En tous cas, l’intérêt est international pour ce procès. Les journalistes étrangers nous disant tous avec un peu d’ironie que le procès d’Avignon intéresse clairement plus leurs lecteurs que la nomination d’un nouveau gouvernement par Michel Barnier.