Voiture de police attaquée: l'opinion se déchire après qu'un policier a mis en joue des manifestants

Existe-t-il une haine de la police en France? C'est en tout cas ce qu'affirme Gérald Darmanin, le ministre de l'Intérieur, qui affirmait samedi soir sur X que l'on "voit où mène la haine anti-police". Un message qui fait écho à une scène choc survenue samedi après-midi en marge de la marche contre les violences policières et le racisme systémique à Paris.
Pour rappel, aux alentours de 16h30, des manifestants cagoulés s'en sont pris à une voiture de police qu'ils ont attaquée à coups de barre de fer, de coups de pieds et de jets de projectile.
Le véhicule s'est retrouvé bloqué dans la circulation, ce qui a conduit un fonctionnaire de police à bord de la voiture à ouvrir sa portière, à quitter le véhicule et à sortir son arme à feu pour tenir à distance le groupe violent pendant une dizaine de secondes. Il est ensuite remonté dans le véhicule qui a pu reprendre la route après l'intervention de la BRAV-M.
Nunez en soutien, Boyard et Rousseau à la critique
Depuis hier, la scène a évidemment provoqué de nombreuses réactions. A commencer par Laurent Nuñez, le préfet de police de Paris, qui a expliqué sur Franceinfo qu'avec "beaucoup de sang froid, un effectif de police fait une sortie d'arme administrative, avec son doigt sur le pontet systématiquement".
"Ça dure quelques secondes et il regagne son véhicule pour pouvoir se dégager, je n'ai pas d'observation à formuler sur cette opération policière si ce n'est de saluer le courage et le sang froid des effectifs", a justifié le préfet de Police Laurent Nuñez.
Toutefois, des critiques se sont aussi élevées depuis les faits, notamment du côté de la gauche. Le député des Insoumis Louis Boyard sur BFM TV, tout en dénonçant la "situation de tension et de violence", a critiqué la qualification de manifestation "anti-flic" lancée par Gérald Darmanin.
"Si vous voulez que les violences cessent, que ce soit les violences policières ou les violences des manifestants, alors vous avez besoin d'une réponse politique, qui passera par une réforme de la police", a estimé Louis Boyard, député LFI du Val-de-Marne sur BFM TV samedi.
La députée écologiste Sandrine Rousseau s'est elle aussi exprimée sur le réseau social X, à la suite de la diffusion de la vidéo où l'on peut voir la voiture de police être attaquée. Selon elle, le geste du policier est "inadmissible".
Pour le cofondateur du collectif Peuple Révolté, Ritchy Thibault, il "est assez gravissime qu'un policier mette en joue, dans le cadre d'une manifestation, des populations civiles". De plus, il est important selon lui de creuser la question afin de connaître les raisons de ce déferlement de violences.
"Si, pour reprendre les termes du pouvoir, il y a une haine anti-police, une colère, une rage même, il faut comprendre d'où elle vient car c'est bien de la dénoncer et de s'indigner, mais d'où elle vient?", a questionné Ritchy Thibault dans la Matinale WeekEnd.
Selon lui, cette "rage" envers les forces de l'ordre provient du fait que "pendant des décennies, il y a des dizaines de personnes qui chaque année dans les quartiers populaires qui se font tuer par la police car ils sont Noirs, Arabes ou Gitans comme moi".
"Une balle, un flic", Ritchy Thibault ne condamne pas
Mis à part ce débordement dans la marche parisienne, un carton sur lequel est écrit " un flic une balle" a aussi été repéré dans le cortège à Besançon. C'est la préfecture du Doubs qui a remonté l'information et partagé son indignation dans un communiqué.
Le préfet a qualifié cet acte de scandaleux à l'encontre des forces de l'ordre et a rappelé que cette pancarte a été vue moins de 48 heures après une tentative d'homicide d'une rare violence à l'encontre d'un policier de la BAC à Sochaux après un refus d'obtempérer.
Du côté de Ritchy Thibault, pas de condamnation catégorique de ces propos. Il a préféré critiqué selon lui la différence de traitement et de réaction entre l'attaque de la voiture à Paris et le supposé "tollé" plus léger provoqué par la mort de Nahel.
"Quand il y a le jeune Nahel qui se fait tuer, je ne vois pas un tollé aussi conséquent dans l'espace médiatique et ça m'interroge", a-t-il lancé en réponse à Matthieu Rouault.
Alors en France, existe-t-il un réel sentiment de haine envers la police? S'il est compliqué de répondre simplement à cette question, les sondages semblent toutefois assez clairs… pour montrer la division du pays sur la question.
Selon un récent sondage IFOP, 57 % des Français ont confiance dans la police. C'est 7 points de plus qu'en 2020, année marquée par l'affaire Michel Zecler, qui avait été roué de coups par deux policiers dans la rue.
Mais pour trois Français sur 10 en revanche, la police inspire de l'inquiétude ou de l'hostilité. Notons enfin que l'image de la police est influencée par l'opinion politique des Français, puisque 20 % des sympathisants de la France insoumise et 35 % des écologistes ont confiance dans les forces de l'ordre. C'est 60 % chez les socialistes, 61 % chez le RN ou encore 90 % chez les sympathisants républicains.