C'ETAIT 2020 - Retour sur la "drôle d'année" de Macron, "Quoi qu'il en coûte"

"On a une drôle d'année": le 8 octobre, Emmanuel Macron reconnaît que 2020 aura percuté de plein fouet son quinquennat et plombé ses ambitions réformatrices qu'il entend toutefois relancer avant la présidentielle de 2022.
"Ce que nos concitoyens attendent de nous pour l'année 2021, c'est d'en faire une année utile de combat, de relance et d'ambition", a-t-il lancé au dernier Conseil des ministres le 21 décembre, exceptionnellement retransmis pour montrer qu'il était au travail malgré sa fatigue due au Covid-19.
Et le président de détailler dans un long entretien à L'Express sa stratégie qui s'appuie sur les Français "patriotes et européens" pour "réconcilier" par "l'action" un pays miné par des "divisions" qui persistent trois ans et demi après son entrée à l'Elysée.
Se projetant vers la présidentielle de 2022, pour laquelle il n'a pas encore dit s'il serait candidat, Emmanuel Macron, qui résiste dans les sondages, avance un nouveau slogan: "Nous, Français", qu'il présente comme "un principe d'action".
Fidèle au "en même temps" de sa campagne de 2017, Emmanuel Macron ignore le clivage droite-gauche, semblant vouloir balayer de la gauche souverainiste à la droite sarkozyste, sans d'ailleurs hésiter à provoquer en évoquant "les privilèges de l'homme blanc" ou le Maréchal Pétain. Il salue à la fois "l'intuition" de Nicolas Sarkozy lorsqu'il a lancé "il y a dix ans" un débat sur "l'identité française", et celle de François Mitterrand pour avoir promu le "rêve européen" tout en évoquant une "matrice" proche du ténor souverainiste Jean-Pierre Chevènement.
"Pandémie historique"
Emmanuel Macron, qui doit adresser ses voeux jeudi pour 2021, veut reprendre la main après une année 2020 balayée par "cette pandémie historique, les crises internationales, le terrorisme, les divisions de la société et une crise économique et sociale sans précédent", comme il le résume dans son allocution du 28 octobre.
A la mi-mars, Emmanuel Macron annonce que "toutes les réformes en cours sont suspendues", dont celle des retraites qu'il avait promise. Il exhorte les Français à la "mobilisation générale" face au Covid-19, contre lequel "nous sommes en guerre". Suivront des mois imprévisibles, rythmés par la succession des Conseils de défense sanitaires, des annonces de restrictions puis de leur assouplissement, et des polémiques sans fin sur les masques ou les tests.
Au fil de ses huit allocutions télévisées, qui battent des records d'audience, le chef de l'Etat adapte son discours à la crise et aux critiques. Après avoir endossé l'uniforme de chef de guerre, il enfile le costume de président protecteur, appelant à "l'unité".
"Quoi qu'il en coûte"
Il lance la mobilisation de tous les moyens nécessaires face à la crise, et ce, "quoi qu'il en coûte". Avec, à la manoeuvre, un Etat omniprésent et dépensier comme jamais. Au début de l'été, Emmanuel Macron saisit l'occasion d'un retour à une certaine normalité pour tenter de relancer une fois de plus son quinquennat. Pour Matignon, il parie sur un quasi-inconnu, Jean Castex, le "M. déconfinement", en lieu et place du populaire Edouard Philippe.
Las, deux mois plus tard, l'épidémie chamboule la rentrée et la reprise économique que devait booster l'injection des 100 milliards d'euros du plan de relance. L'exécutif est accusé d'avoir mal anticipé la deuxième vague, qui l'oblige à instaurer un couvre-feu suivi d'un reconfinement national. "Les restrictions, c'est quand on a tout raté", cinglera en octobre la présidente du RN Marine Le Pen. Mais, pariant sur la stratégie du "vivre avec le virus", il s'attaque au régalien, considéré comme un angle mort du macronisme.
Le 2 octobre, il présente aux Mureaux (Yvelines) sa stratégie pour lutter contre l'islam radical, longtemps attendue. L'actualité le rattrape avec le retour des attentats: la décapitation du professeur Samuel Paty le 16 octobre par un islamiste russe tchétchène de 18 ans, puis l'attentat de Nice.
Face à la très forte émotion de la population, l'exécutif durcit son discours sécuritaire. Mais se retrouve piégé dans une crise politique provoquée par la concomitance de la controverse sur la loi sur la Sécurité globale et du scandale provoqué par les images de policiers tabassant un producteur de musique.
Emmanuel Macron est contraint de calmer le jeu et convoque un "Beauvau de la sécurité". "Je ne peux pas laisser dire qu'on réduit les libertés en France", affirme-t-il face aux critiques venues aussi de pays anglo-saxons. Il doit également se défendre de stigmatiser les musulmans, après des manifestations, parfois violentes, à l'étranger autour de la republication de caricatures de Mahomet par Charlie Hebdo.
Sur la défensive en France, le président cherche l'initiative sur la scène internationale où il est régulièrement insulté par le président turc Recep Tayyip Erdogan. Avec des résultats mitigés.
Grâce à sa complicité affichée avec Angela Merkel, il porte "la grande avancée" que représente l'adoption par l'UE de l'énorme plan de relance de 750 milliards d'euros pour faire face à l'épidémie et de l'accord post-Brexit, tombé sous le sapin de Noël. Mais il essuie une cuisante déconvenue dans sa tentative de provoquer un électrochoc politique au Liban après la tragique explosion du 4 août au port de Beyrouth.
S'il a repris l'initiative pour 2021 en proposant aussi un référendum qui inscrit la défense de l'environnement dans la Constitution, il reste prudent pour 2022. "Peut-être que je devrai faire des choses dures dans la dernière année parce que les circonstances l'exigeront, et qui rendront impossible le fait que je sois candidat", a-t-il même avancé le 4 décembre sur le média en ligne Brut.