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Narcotrafic: l'Assemblée approuve le texte en première lecture, après des débats mouvementés

Assemblée nationale (illustration)

Assemblée nationale (illustration) - AFP

Ce mardi 1er avril, l'Assemblée a largement approuvé une proposition de loi sénatoriale pour "sortir la France du piège du narcotrafic", un texte clé de la politique de sécurité du gouvernement qui a suscité de vifs débats dans l'hémicycle.

L'Assemblée nationale a largement approuvé mardi en première lecture une proposition de loi sénatoriale pour "sortir la France du piège du narcotrafic", un texte clé de la politique de sécurité du gouvernement qui a suscité de vifs débats dans l'hémicycle.

Le texte a été approuvé par 436 voix contre 75. La coalition gouvernementale et le RN ont voté pour, tandis que la gauche s'est divisée: le PS a voté pour, LFI contre, tandis que les députés écologistes et GDR se sont majoritairement abstenus. Le texte doit être adopté définitivement les 28 et 29 avril au Sénat et à l'Assemblée, après une commission mixte paritaire permettant d'accorder les points de vue des deux chambres.

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Rares sont finalement les dispositions à faire consensus, comme la création d'un parquet national anticriminalité organisée (Pnaco), au coeur du texte, ou la mise en place d'un régime plus attractif pour les "repentis". Face aux trafiquants, "nous ne sommes pas dans un combat à armes égales", avait défendu le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau qui, avec son collègue de la Justice Gérald Darmanin, a soutenu ce texte d'origine parlementaire.

Une fois la proposition de loi adoptée, le gouvernement devrait convoquer une commission mixte paritaire permettant aux sénateurs et députés de s'accorder sur une version commune du texte. Son adoption définitive est prévue le 28 avril au Sénat et le 29 à l'Assemblée.

Alors que la proposition de loi des sénateurs Étienne Blanc (LR) et Jérôme Durain (PS) avait été approuvée à l'unanimité au Palais du Luxembourg le 4 février, ce ne sera pas le cas à l'Assemblée, La France insoumise ayant déjà annoncé qu'elle voterait contre.

"Le texte est pire qu'à l'issue de la commission des lois, et ne permettra pas de sortir la France du narcotrafic", a jugé auprès de l'AFP le député LFI Antoine Léaument.

Les socialistes ont eux annoncé qu'ils voteraient pour, sans exclure de saisir le Conseil constitutionnel si certaines dispositions sont maintenues dans le texte final, qui doit être "modifié et équilibré", a jugé la porte-parole du groupe Mélanie Thomin.

Les écologistes s'abstiendront, a déclaré Léa Balage El Mariky, soulignant qu'il y a dans le texte des "dispositions positives", mais aussi des mesures "liberticides". La communiste Elsa Faucillon a, elle, estimé que l'introduction dans le texte de quartiers de haute sécurité était une "barrière infranchissable" pour son groupe, qui sera majoritairement contre, avec quelques abstentions.

Quartiers de haute sécurité

Introduite à la veille du débat en commission à l'Assemblée, la création d'un nouveau régime de détention pour les gros trafiquants a occupé de longues heures de débats, avant d'être adoptée dans une version tenant compte de l'avis du Conseil d'État, sollicité par le garde des Sceaux.

Les députés ont par ailleurs rétabli en séance - après l'avoir supprimée en commission - la création du "dossier coffre" ou "procès-verbal distinct" qui ne sera accessible qu'aux enquêteurs et aux magistrats, une mesure jugée par les avocats pénalistes et la gauche attentatoire aux droits de la défense.

Également rétablies en séance, grâce au soutien du RN à la coalition gouvernementale et dans un hémicycle souvent très clairsemé: la possibilité de prolonger jusqu'à 120 heures la garde à vue des "mules", ou celle d'activer à distance des objets connectés pour espionner des suspects à leur insu.

D'autres mesures ont divisé l'hémicycle avant d'être adoptées, comme le recours, dans le cadre d'une expérimentation, au renseignement algorithmique pour détecter des menaces liées à la criminalité organisée; la possibilité donnée aux préfets de prononcer des "interdictions de paraître" sur les points de deal pour les personnes y participant, ou de fermer des commerces sur de simples soupçons de blanchiment; ou encore la généralisation de la visioconférence pour la comparution des gros trafiquants.

Les députés se sont en revanche accordés pour ne pas rétablir une autre mesure supprimée en commission, entendant contraindre les plateformes de messagerie chiffrée (Signal, WhatsApp) à communiquer les correspondances des trafiquants aux enquêteurs.

La séance consacrée à cette mesure, qui agrège contre elle de nombreux acteurs et experts de la cybersécurité, avait été particulièrement mouvementée, le système de vote électronique tombant en panne au beau milieu des débats.

"Nous ne sommes pas victimes d'un dysfonctionnement lié à la sécurité informatique", avait rassuré la vice-présidente Naïma Moutchou à la reprise de la séance. "C'est une petite pièce du système qui a chauffé... sous la tension", s'était-elle amusée.

C.A avec AFP