RMC
Politique

Martinique: "L’Etat doit réinvestir ses provinces, sinon il les perdra", l’avis tranché d’Arthur Chevallier

placeholder video
La Martinique s’embrase contre la vie chère e un couvre-feu a été ordonné par le préfet. Et, pour l’écrivain et éditeur Arthur Chevallier, la France a sa part de responsabilité. Elle doit s’occuper de ses îles, c’est une question de puissance.

La Martinique s’embrase contre la vie chère. Le préfet a même ordonné un couvre-feu entre 21h et 5h du matin. Même si les violences sont intolérables, la France ne doit pas oublier de s’occuper de ses îles. L’ordre doit être rétabli, mais les Martiniquais doivent être entendus. S’occuper de la Martinique, ce n’est pas seulement une question de morale, c’est une question de puissance. Parce que la France, ce n’est pas seulement une métropole, ce sont aussi des îles dans tous les océans. Si on ne règle pas le problème du prix des aliments, en moyenne 40% plus chers qu’en métropole, les violences recommenceront. Le destin de notre empire marin, ça ne peut pas être de devenir une caserne de gendarmerie à ciel ouvert. Hier c’était en Corse, aujourd’hui en Martinique et en Nouvelle-Calédonie. Les gendarmes sont épuisés et ça nous coûte une fortune. Parce qu’après des émeutes, il faut tout reconstruire.

La Martinique, ce n’est pas seulement une question de principe, c’est aussi une question d’intérêts. Depuis Paris, on ne s’en rend pas compte, mais la France avec et sans ses îles, ça n’a rien à voir. 11 millions de km² de surface maritime! Ça fait de nous la deuxième puissance maritime du monde derrière les Etats-Unis. Si on cumule la surface terrestre et la surface de la mer, la France est un pays plus grand que la Chine! Ça permet à notre armée de se projeter partout. Bref, la mer, c’est une des dernières choses que la France maîtrise à peu près. Si on n’assume pas nos responsabilités vis-à-vis de nos îles, elles se tourneront vers d’autres puissances. Regardez la Nouvelle-Calédonie: la Chine profite de la situation et son influence grandit là-bas depuis le début de la crise. La compétition mondiale, ça se joue aussi sur les océans.

La matinale 100% info et auditeurs. Tous les matins, Apolline de Malherbe décrypte l'actualité du jour dans la bonne humeur, avec un journal toutes les demies-heures, Charles Magnien, le relais des auditeurs, Emmanuel Lechypre pour l'économie, et Matthieu Belliard pour ses explications quotidennes. L'humoriste Arnaud Demanche vient compléter la bande avec deux rendez-vous à 7h20 et 8h20.
L'avis tranché d'Arthur Chevallier : La France oublie-t-elle de s'occuper de ses îles ? - 20/09
3:15

Si la France veut continuer d’être grande, ça a un coût

Les Martiniquais n’ont-ils pas parfois l’impression d’être des sortes de sous-Français? C’est bien possible, mais ils ont tort. Non seulement ils sont Français, mais ils le sont même depuis très longtemps. L’île est française depuis 1635, c’est-à-dire l’époque de Louis XIII. Elle l’est donc depuis plus longtemps que Dunkerque, le Roussillon, l’Alsace, la Savoie ou même Nice. Fort-de-France, à l’époque, ça s’appelait Fort Royal, et c’était une gigantesque plaque tournante de notre commerce. Évidemment, la Martinique n’a pas non plus été épargnée par l’esclavage. Même si ce n’est pas notre moment préféré, c’est aussi notre histoire commune. Depuis, elle a donné de grands écrivains à la France, comme Aymé Césaire ou Edouard Glissant.

Donc tout nous pousse à agir en profondeur. Si la France veut continuer d’être grande, ça a un coût. Les îles, ça coûte cher. Ce n’est pas de la faute des insulaires, c’est de la faute de la géographie. La violence n’est pas acceptable, mais il faut aussi arrêter de se raconter des histoires. Prenez la Corse, si on met de côté le terrorisme, on est obligés d’admettre qu’elle manque de moyens. Rendez-vous compte, elle n’a même pas de CHU. En Martinique, c’est un problème du même ordre: les gens n’ont pas assez d’argent pour acheter de la nourriture, ça n’a rien à voir avec l’insécurité, le trafic de drogue ou l’islamisme. Les Martiniquais ne demandent pas moins de France, mais, justement, plus de France! L’Etat doit réinvestir ses provinces, sinon il les perdra. La répression, c’est bien, les solutions, c’est mieux.

Arthur Chevallier