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Pourquoi la loi immigration sera le prochain combat de la majorité, après les retraites

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Alors que les députés et sénateurs planchent depuis des semaines et parfois houleusement sur la réforme des retraites, en coulisses, on s'active pour préparer la prochaine loi immigration. Et ça s'annonce encore une fois compliqué.

Tous les regards sont tournés vers la réforme des retraites. Pourtant, en coulisses, la majorité se penche sur un autre texte, tout aussi explosif, celui sur l’immigration. Cela fait des mois qu’un groupe de travail anticipe l’arrivée du texte au Parlement. D’abord au Sénat dès la semaine prochaine puis à l’Assemblée au printemps.

Mais un peu à l’abri des projecteurs, les députés de la majorité passent à la vitesse supérieure. L’immigration sera au menu d’un déjeuner ce mardi autour du ministre Gérald Darmanin. Et dans la foulée, une petite dizaine de députés Renaissance se réuniront en ce qu’ils appellent une “Task Force” autour de leur cheffe de file Aurore Bergé. Parmi eux, Sacha Houlié, Benjamin Haddad, Stella Dupont, Mathieu Lefevre…

Leur mission est double. D’abord travailler sur le fond du texte, qui repose sur deux jambes: plus de fermeté avec les délinquants étrangers et régularisation de travailleurs sans papiers dans les métiers en tension. Autre mission, être en ordre de marche pour aller chercher une majorité sur le texte. Et pour l’instant, ce n’est pas gagné, de l'aveu même d’un élu de la majorité, puisque ni la droite ni la gauche ne comptent voter le texte. A tel point que certains redoutent déjà l’arrivée du texte dans l’hémicycle et font tout pour la repousser.

Comment convraincre les députés LR

En réunion de groupe la semaine dernière, plusieurs députés, échaudés par les débats sur la réforme des retraites, sont montés au créneau pour demander que le texte soit plutôt examiné au second semestre 2023. Une façon de ne pas se replonger trop vite dans une séquence explosive. La plupart plaident quand même pour respecter le calendrier établi parce que “les Français attendent des réponses en la matière”, confie un député macroniste.

Quand certains expriment des regrets, un député Renaissance estime qu’au lieu de faire un texte censé séduire la droite “et en même temps” la gauche, ce qui ne marche pas, il aurait été plus judicieux de couper le texte en deux. La partie sur la fermeté migratoire aurait trouvé une majorité avec LR, celle sur la régularisation des travailleurs sans papiers aurait trouvé les faveurs de la gauche. Mais pour l’instant, “c’est comme si on sautait dans le vide et que l’on ne savait pas si le parachute fonctionne à la fin”, ironise ce même élu en voyant la perspective de voir le texte voté s’éloigner.

Beaucoup attendent d’abord la version qui va sortir du Sénat. Si le calendrier est respecté, il arrivera donc à l’Assemblée en juin et ce sera une version amendée, modifiée, par les sénateurs à majorité de droite et donc très vraisemblablement une version durcie.

Ça tombe plutôt bien puisque c’est du côté des LR que le camp présidentiel compte tout de même trouver des voix pour voter le texte. Et pour ça, “il faut qu’il y ait des bougés”, un changement de cap, une inflexion, nous dit un député de la majorité. C’est précisément ce sur quoi planche la "Task force" Renaissance avec une question qui revient, celle de la mise en place de quotas demandée par la droite.

Ils pourraient être appliqués sur l’attribution du nouveau titre “métiers en tensions” ou même plus globalement pour plafonner chaque année l’immigration économique, avec un seuil qui serait par exemple voté tous les ans par l’Assemblée nationale. À ce sujet, le débat existe au sein de la majorité. Un élu de l’aile gauche n’y est pas du tout favorable. Il trouve ça “inefficace”. Plus optimiste, il pense que le texte peut passer grâce à l’abstention d’une partie de la droite et de la gauche. Son objectif, mettre les groupes face à leurs propres contradictions, dit-il. “La régularisation des travailleurs sans papiers, la gauche ne l’a jamais proposée”.

Hélène Terzian