Robert Badinter, ancien ministre de la Justice, est mort

Une grande figure de l'histoire politique française vient de s'éteindre. Robert Badinter, ancien ministre de la Justice sous François Mitterrand (1981-1986), est mort à l'âge de 95 ans, a confirmé sa collaboratrice à l'AFP. Il avait fait abolir la peine de mort en 1981, devant le Parlement.
Né en 1928 à Paris, Robert Badinter à 14 ans quand son père est arrêté par la Gestapo pendant l'occupation nazie, avant d'être déporté et mourir dans un camp de concentration.
Après des études de droit, Robert Badinter devient avocat. C’est pendant sa carrière qu’il s'illustre en évitant la peine capitale à de nombreux criminels comme Patrick Henry, finalement condamné à la prison à perpétuité pour le meurtre d’un enfant en 1977. Entre 1977 et 1980, cinq criminels jugés aux assises et défendus par Robert Badinter échappent ainsi à la guillotine.
Abolition de la peine de mort
Socialiste et proche de François Mitterrand, il est nommé ministre de la Justice en juin 1981 après l'arrivée au pouvoir du PS. Dès sa prise de poste, il présente le projet de loi d’abolition de la peine de mort: "J'ai l'honneur de demander à l'Assemblée nationale l'abolition de la peine de mort en France. Demain, grâce à vous, la justice française ne sera plus une justice qui tue", lance-t-il devant les députés.
"Ceux qui croient à la valeur dissuasive de la peine de mort méconnaissent la vérité humaine. La passion criminelle n'est pas plus arrêtée par la peur de la mort que d'autres passions ne le sont. La peur de la mort n'a jamais arrêté d'autres passions", martèle Robert Badinter.
"Seule pour la peine de mort on a inventé l'idée que la peur de la mort retient l'homme dans ses passions extrêmes", poursuit le ministre de la Justice.
Son projet de loi est adopté par l’Assemblée nationale grâce à la majorité de gauche puis par le Sénat et promulgué le 10 octobre 1981.
Son combat contre la peine de mort ne s'achève pas avec son abolition en 1981. Robert Badinter il participe au premier Congrès mondial contre la peine de mort en 2001 et qualifie l'exécution du dictateur irakien Saddam Hussein en 2006 de "faute politique majeure" avant de militer pour l'inscription de l'abolition de la peine de mort dans la constitution.
En 2021, il est ulcéré quand des manifestants brandissent une tête d'Emmanuel Macron au bout d'une pique: "La représentation d'une tête au bout d'une pique est à mes yeux absolument et totalement condamnable", dénonce-t-il.
Défense des droits des homosexuels
A la tête du ministère de la Justice, Robert Badinter s’illustre aussi dans son combat pour les droits des homosexuels en dépénalisant les relations homosexuelles avec des mineurs de plus de 15 ans, promesse de François Mitterrand pendant sa campagne pour la présidentielle de 1981.
Comme dans son combat contre la peine de mort, sa lutte dépasse les frontières et se poursuit après ses victoires politiques en France. Il plaide ainsi pour une "dépénalisation universelle de l'homosexualité".
Président du Conseil constitutionnel puis sénateur
Nommé président du Conseil constitutionnel en 1986 par François Mitterrand, il quitte ses fonctions en 1995. Il devient alors sénateur des Hauts-de-Seine jusqu’en 2011, avant de se consacrer à la littérature.