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Tensions France-Algérie: la stratégie musclée de Bruno Retailleau face au régime algérien

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Bruno Retailleau veut passer de la parole aux actes dans le dossier algérien et il veut frapper fort. C’est un Dossier compliqué que Matthieu Belliard va simplifier.

Bruno Retailleau veut frapper fort dans la crise qui oppose Paris à Alger. Nos confrères de La Tribune Dimanche ont pu consulter un document confidentiel du ministère de l’Intérieur. Trois pages d’une note intitulée “Crise politique avec l’Algérie: de la nécessité d’engager un rapport de force”.

Une liste de mesures en réalité: diplomatie, sécurité, immigration et “accentuer la pression”, est-il écrit. On a pu reprocher à Bruno Retailleau de se payer de mots, de bomber le torse sans agir. Là, c’est un plan d’action précis.

La convention de 1980

D’abord la remise en cause de l’Accord de 1968. Mais ce serait long, compliqué, et pas forcément le plus efficace. Plus concret: le ministre de l’Intérieur veut dénoncer la convention de 1980 qui permet à des algériens de bénéficier de soins financés par la Sécurité sociale.

Bruno Retailleau suggère également de ralentir les procédures d’indemnisation des victimes des essais nucléaires français dans le désert algérien dans les années 1960. Et en attendant de pouvoir revoir l’accord de 68, il propose des restrictions de visas. D’abord pour la “nomenklatura”, l’élite algérienne qui bénéficie d’un autre accord.

Par un décret en 2008, Nicolas Sarkozy a permis aux titulaires d’un passeport diplomatique d’être exemptés de visas. La note du ministère de l’Intérieur préconise de revenir sur ce droit. Et plus largement: de restreindre les visas aux cercles militaires et économiques algériens.

Face à Face : Bruno Retailleau - 03/03
Face à Face : Bruno Retailleau - 03/03
20:06

Mesures "patrimoniales"

La note prévoit aussi de frapper au portefeuille. On parle de mesures “patrimoniales”: cibler les intérêts algériens, voire des actifs ici en France. Cibler aussi les compagnies algériennes et maritimes algériennes.

Air Algérie est accusée de ralentir les procédures. Elle impose aux algériens expulsés d’être munis d’un laissez-passer consulaire: même lorsqu’ils ont des documents algériens. L’Intérieur préconise aussi des contrôles renforcés des ferries qui arrivent via la méditerranée. Pour le ministère, ces mesures ne sont qu’une réponse. Ce n’est pas nous qui avons commencé, semble dire la Place Beauvau. Liste des manquements algériens à l’appui.

Après que la France a pris parti pour le Maroc l’été dernier dans le conflit territorial qui oppose le royaume à l’Algérie, la note précise aussi que les autorités algériennes ont pris des “mesures de rétorsion à notre encontre”. Le cas de l’écrivain Boualem Sansal, toujours incarcéré en Algérie.

Des intérêts français en Algérie seraient menacés aussi. Bruno Retailleau demande également une surveillance accrue de l’activité des services de renseignement algériens en France. Et dénonce l’intervention massive d’influenceurs algériens comme une menace directe à notre sécurité.

Exemple du cas Doualemn, tiktokeur expulsé puis refoulé par l’Algérie, malgré son passeport. Bruno Retailleau précise que 40% des individus maintenus en Centre de Rétention Administrative sont algériens. Il veut établir une liste de “personna non grata” à expulser.

Quelle réponse à cette liste de préconisations va-t-il obtenir?

Mercredi dernier, le premier ministre François Bayrou a donné 4 à 6 semaines à l’Algérie pour récupérer ses ressortissants que la France souhaite expulser.

Vendredi, Emmanuel Macron a affirmé qu’il souhaite “réengager un travail de fond” sans que la relation entre nos deux pays “ne fasse l’objet de jeux politiques”. La Tribune Dimanche qui publie ces éléments parle d’un “abrégé de la doctrine Retailleau”.

Et ça a commencé. L’épouse de l’ambassadeur d’Algérie au Mali refoulée à Roissy vendredi soir. Idem pour l’ancien directeur de cabinet du président algérien il y a deux semaines. Désormais, pour les diplomates, le passeport diplomatique doit être accompagné d’un ordre de mission. Le ministère de l’Intérieur parle d’une riposte graduée. La presse algérienne est furieuse.

Matthieu Belliard