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Ce que prévoit l'accord franco-algérien de 1968, que François Bayrou menace de remettre en cause

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Pas de volonté d'"escalade" avec l'Algérie, mais une menace de remettre en cause les accords de 1968: François Bayrou a réuni mercredi un comité interministériel sur l'immigration, sur fond de tensions croissantes avec Alger, ravivées avec l'attentat de Mulhouse. Mais quel est cet accord franco-algérien?

L'accord franco-algérien de 1968, que Paris menace de dénoncer, confère un statut particulier aux Algériens dont il régit les conditions de circulation, de séjour et d'emploi en France. La France va demander à Alger de "réexaminer" cet accord, et la façon dont il est exécuté, dans un délai de quatre à six semaines, a annoncé mercredi le Premier ministre François Bayrou, en insistant sur la question des réadmissions.

Paris va notamment fournir au gouvernement algérien une "liste d'urgence" de personnes considérées comme "sensibles" et que le gouvernement français veut voir reprises par l'Algérie, faute de quoi l'accord de 1968 sera dénoncé. Cette menace intervient dans un contexte de grave crise avec l'Algérie, après notamment l'attentat meurtrier samedi de Mulhouse, dont est accusé un ressortissant algérien en situation irrégulière que, selon Paris, l'Algérie a refusé de reprendre à quatorze reprises.

Qu'est-ce que l'accord franco-algérien de 68?

Il s'agit d'un accord bilatéral signé le 27 décembre 1968 qui crée un statut unique pour les ressortissants algériens en matière de circulation, de séjour et d'emploi. Le texte, qui relève du droit international et prime donc sur le droit français, écarte les Algériens du droit commun en matière d'immigration. Ils n'ont, depuis, pas de carte de séjour en France mais des "certificats de résidence pour Algérien", dont 615.000 ont été délivrés en 2023.

Pourquoi cet accord?

L'accord est signé six ans après la fin de la guerre d'Algérie (1954-1962), alors que la France a besoin de bras pour soutenir son économie. Dans le décret d'application du 18 mars 1969, la démarche est justifiée par "la nécessité de maintenir un courant régulier de travailleurs", qui "tienne compte du volume de l'immigration traditionnelle algérienne en France". Les Algériens restent aujourd'hui en France les premiers ressortissants étrangers, en nombre.

Quelles sont les principales dispositions?

L'accord crée un régime d'immigration favorable pour les Algériens. Leur entrée est facilitée (sans qu'ils n'aient besoin de visa de long séjour), ils peuvent s'établir librement pour exercer une activité de commerçant ou une profession indépendante et accèdent plus rapidement que les ressortissants d'autres pays à la délivrance d'un titre de séjour de 10 ans.

Dans le cadre d'un regroupement familial, les membres de la famille reçoivent également un certificat de résidence de 10 ans dès leur arrivée si la personne qu'ils rejoignent possède ce titre. Les Algériens peuvent aussi solliciter un titre décennal après trois ans de séjour, contre cinq pour les autres nationalités.

En revanche, puisque leur statut est régi par ce seul accord, ils ne peuvent pas prétendre aux autres titres créés récemment, comme le "passeport talent" ou la carte "étudiant programme de mobilité". Les étudiants algériens, eux, y perdent: ils ne peuvent pas travailler, pour un job étudiant par exemple, sans solliciter une autorisation provisoire.

L'accord est-il inchangé depuis 1968?

L'accord a fait l'objet de trois révisions, en 1985, 1994 et 2001, qui ont débouché sur trois avenants, mais les grands principes du texte ont été maintenus, en particulier le régime dérogatoire au droit commun.

C.A avec AFP