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La COP 28 à Dubaï : "Les pétroliers ont menti et sont coupables" pour l'écologiste Camille Etienne

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La COP 28 de Dubaï doit s'accorder sur une "réduction" ou une "sortie" des énergies fossiles, alors que la grand-messe de l'écologie a lieu sur le territoire d'un grand producteur de pétrole et que le président de la réunion est lui-même un pétrolier de poids.

La COP 28 s'est ouverte ce jeudi, à Dubaï. Les représentants des 197 pays présents ont présenté une première version d'un projet d'accord appelant à sortir des énergies fossiles comme le charbon, le pétrole et le gaz, grandes responsables des émissions de gaz à effet de serre comme le CO2.

Les pays doivent préparer une "réduction/sortie des énergies fossiles", selon les termes de ce document préparé par le Royaume-Uni et Singapour. Les participants à la COP 28 devront donc s'accorder sur le choix du terme "réduction" (phase-down, en anglais) ou celui, beaucoup plus ambitieux, de "sortie" (phase-out).

Mais les écologistes s'inquiètent. "Je pense que cela ne va pas changer grand-chose", estime déjà Camille Etienne, militante écologiste, auteure de Pour un soulèvement écologique. "C'est une COP de la honte", ajoute-t-elle dans Apolline Matin ce vendredi sur RMC et RMC Story. "Pas par rapport à Dubaï", important producteur de pétrole, "mais en raison des énergies fossiles ultra-présentes".

Quand le président de la COP 28 en profite pour vendre du pétrole

"Ce qui est terrifiant, c'est qu'on laisse le lobby des industries fossiles, responsable des dérèglements climatiques, au cœur des négociations. Le président de cette COP 28 (l'émirati Sultan Al Jaber, PDG d'une compagnie pétrolière d'Abu Dhabi, NDLR) est aussi président d'une des plus grandes compagnies fossiles", alerte Camille Etienne.

Un président de la Cop 28 qui aurait prévu d'utiliser cette réunion pour aboutir à des accords concernant la vente de pétrole, selon la BBC.

Un mauvais signe alors qu'il y a urgence à agir contre les énergies fossiles, alerte Camille Etienne: "C'est un consensus scientifique qui dit que si on continue dans cette direction, on ne se donne aucune chance de s'en sortir", assure-t-elle.

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"Ces COP sont nécessaires mais loin d'être suffisantes"

Mais il n'y a pas que des mauvaises nouvelles. La création d'un fonds d'aide pour les pays les plus menacés par le réchauffement climatique a été entérinée ce jeudi, au coup d'envoi de la COP 28.

"C'est une bonne nouvelle, c'est l'aboutissement de la COP 27. Ce qui est dommageable pour l'instant, c'est que financièrement, c'est extrêmement faible. On estime le besoin à 580 milliards par an en 2030 pour ses pays-là et seuls 250 millions ont été donnés", poursuit l'écologiste.

"On ne respecte pas nos propres engagements", déplore Camille Etienne. "Ces COP sont nécessaires mais loin d'être suffisantes, il ne faut pas remettre tous nos espoirs dans ces grandes messes, mais il faut reconnaître les vrais coupables et imposer des contraintes aux industries fossiles", martèle-t-elle.

"Il ne faut pas culpabiliser l'intégralité des Françaises et des Français au même niveau que Patrick Pouyanné, le PDG de TotalEnergies. J'espère voir de mon vivant de grands procès. Quand on regarde les responsabilités de ces gens, on s'aperçoit qu'ils savaient dès les années 70 que les énergies fossiles allaient condamner la vie sur la Terre. Pourtant, ils ont menti, ils sont coupables", assure Camille Etienne.

"Chaque degré compte, chaque effort est important"

L'écologiste appelle cependant à ne pas céder à la panique, à continuer les efforts mais à continuer à vivre: "Chaque degré compte et chaque effort est important", explique Camille Etienne, réfutant cependant l'idée de ne plus faire d'enfants ou de ne plus manger de viande.

"Je trouve ça triste comme vision de l'écologie de décarboner notre existence. Dans ce cas-là, arrêtons de vivre. C'est terrible de voir ça comme ça, c'est une démission de nos conditions d'humains", alerte-t-elle.

"En revanche, l'idée de demander plus à ceux pour qui ça coûte le moins, en taxant les super profits pour payer la transition écologique, cela permettrait de rendre possible d'utiliser les transports en commun à tous et laisser sa voiture chez soi. Il faut miser sur les services publics avant tout", conclut Camille Etienne.

La COP 28 doit s'achever le 12 décembre. Les participants ont donc 12 jours pour s'accorder sur une réduction ou une sortie des énergies fossiles. Dans l'antre des pétroliers.

Guillaume Dussourt Journaliste BFMTV-RMC