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Climat: qu'est-ce que le phénomène "El Nino", qui va entraîner une hausse des températures?

La sécheresse au Honduras (image d'illustration)

La sécheresse au Honduras (image d'illustration) - Eitan Abramovitch - AFP

L'ONU a annoncé mardi le retour du phénomène El Niño, qui provoque une hausse des températures à l'échelle de la planète. Couplé au réchauffement climatique et à l'inhabituelle hausse des températures dans l'Atlantique Nord, les météorologues craignent une accélération "terrifiante" des hausses de températures dans les prochains mois.

C'est l'enfant terrible du climat. On l'appelle El Niño, "le garçon" en espagnol. Un garçon qui ne va pas apporter des bonnes nouvelles pour la planète. C'est un phénomène climatique qui revient de façon irrégulière et qui dure généralement de six à 18 mois. Tout commence par une baisse des vents sur l’océan Pacifique, qui entraîne une montée de la température de l’eau à la surface. Ce réchauffement du plus grand océan du monde a des conséquences sur toute la planète par une sorte d’effet papillon.

El Niño entraîne généralement une augmentation globale des températures dans le monde entier, provoquant des fortes pluies en Amérique, en Asie centrale et à l’est de l'Afrique. À l’inverse de très graves sécheresses en Australie, l'Amérique centrale ou au sud de l'Asie.

Des premiers signes en avril

Les premiers signes du retour d’El Niño ont été repérés en avril: les satellites ont mesuré des vagues d’eau chaude dans l'océan Pacifique. Les océanographes américains ont confirmé la mauvaise nouvelle, le 8 juin dernier. Finalement, mardi, l’ONU a officialisé l’alerte et demandé que les États se préparent à une hausse des températures quasiment certaine pour au moins six mois.

El Niño n'était plus revenu depuis sept ans exactement. Ces trois dernières années, la planète était même sous l’influence de la Niña, le phénomène inverse qui provoque un refroidissement de l’eau du Pacifique, provoquant normalement un refroidissement global des températures. Sauf que les années 2015-2022 ont été les années les plus chaudes de l’histoire à cause du réchauffement climatique global.

C'est ce qui inquiète aujourd'hui avec le choc de deux phénomènes simultanés: El Niño et le réchauffement climatique. On parle alors de l'hypothèse d'un "super El Niño" qui pourrait avoir des conséquences désastreuses. C'est une hypothèse, une crainte, même si le pire n’est pas certain.

Des records de chaleur battus à la pelle

Une hausse des températures a déjà été mesurée puisque le record absolu de chaleur sur terre a été battu deux fois cette semaine. Lundi, pour la première fois de l'histoire, la température moyenne globale (sur l'ensemble du globe terrestre) a franchi la barre des 17 degrés. Cela ne paraît pas beaucoup mais cette température tient compte des températures aux pôles et du fait que c’est l'hiver dans l'hémisphère sud. Mardi, ce record a de nouveau été battu pour atteindre 17,2 degrés.

Nous ne sommes que début juillet et que normalement la période la plus chaude à l'échelle de la planète est généralement fin juillet. Le mois de juin a été le plus chaud de l’histoire. Des records de chaleurs sont battus un peu partout. On étouffe au sud des Etats-Unis, particulièrement au Texas. C'est également invivable au Mexique mais aussi à l’autre bout de la planète, en Chine, où il a fait presque 50 degrés à Sanbao. Le Sénégal a battu son record pour un mois de juin avec 48 degrés. Des records ont aussi étés battus en Iran, ou en Sibérie. Certains de ces records sont déjà liés probablement à El Niño, même si des confirmations devraient arriver dans les semaines à venir.

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Une accélération "terrifiante" du réchauffement en Europe

L’Europe, qui vient de vivre un mois de juin extrêmement chaud avec des canicules terribles en Espagne dès le mois d'avril, est généralement la partie du globe la moins impactée par El Niño et s’il devait y avoir des conséquences se serait sans doute pour l'année 2024. Sauf qu'un autre phénomène inconnu vient d'être relevé avec une anormale augmentation des températures de l’eau de l’Atlantique nord, accompagné d’une spectaculaire fonte des glaces au Pôle Nord. La banquise a perdu un million de kilomètres carrés par rapport à son record précédent, soit deux fois la surface de la France.

Un phénomène qui explose tous les records que les météorologues anglais cités par le Guardian qualifient de “dingue” et de “très inhabituel et très inquiétant". "Il y a quelques années on voyait le changement climatique comme un phénomène lent, alors que l’on comprend maintenant que tout va plus vite que prévu", explique en substance le patron des prévisions de l'institut britannique de météo, qui parle d'une accélération "terrifiante".

"Il va falloir subir les aléas climatiques"

Le métérologue Patrick Marlière, directeur d'Agate Météo a jugé, ce jeudi dans Charles Matin sur RMC et RMC Story, qu'il y a "une grande inquiétude" et estime que les "records vont continuer d'éclater dans les semaines et les mois à venir."

"Cela ne fait que commencer. El Niño va avoir des conséquences sur l'ensemble de la planète, cela va s'amplifier d'ici la fin de l'année et surtout avoir des conséquences début 2024. On peut déjà parler d'un été 2024 très chaud" estime-t-il.

Pour lui, "faute d'avoir pris de grandes mesures", alors que les scientifiques "tirent la sirène d'alarme depuis 20 à 30 ans", "il va falloir subir les aléas climatiques".

Nicolas Poincaré avec Pierre Courade et MM