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"Brutal et non-concerté": la gronde des agriculteurs après la suspension des exportations de bovins

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La décision du gouvernement de suspendre pendant 15 jours l’exportation de bovins, en raison de la propagation de la dermatose nodulaire, ne passe pas auprès des agriculteurs. "Pas consultés" en amont de cette restriction, qui intervient à une période cruciale de l’année, ils ne décolèrent pas.

Une punition collective. Les agriculteurs ne décolèrent pas depuis que le gouvernement a décidé, vendredi, de suspendre la totalité des exportations d’animaux vivants pendant deux semaines. Une décision prise pour faire face à la propagation de la dermatose nodulaire contagieuse, une maladie virale qui touche actuellement trois régions françaises.

"Ce qui fâche dans cette histoire, c'est la brutalité de l'annonce, qui a été prise sans concertation avec les professionnels", s'indigne Manon Pisani, trésorière adjointe des Jeunes agriculteurs, dans le 5/7, le morning RMC. "C'est au plus mauvais moment de l'année pour les éleveurs de bovins. C'est à dire quand les prix sont les plus hauts et que le contexte est porteur."

L’incompréhension est la même du côté de Geoffrey Rivaux, président du syndicat FNSEA dans l’Allier: "Nous étions à la manœuvre pour justement éradiquer la maladie et nous ne comprenons pas la position de la ministre de l’Agriculture", a-t-il indiqué au micro de RMC.

Une maladie dangereuse pour les troupeaux

Cette annonce n’est pas anodine pour la filière. En 2024, la France était encore le premier exportateur mondial d’animaux vivants, avec 1,3 million de bovins envoyés à l’étranger, selon l’Institut de l’élevage (Idele). Un marché qui pèse environ 2,8 milliards d’euros dans l’Hexagone.

"Des éleveurs vont perdre de l’argent du fait de ne pas pouvoir vendre des animaux pour le marché auquel ils étaient destinés et calibrés", indique Manon Pisani sur RMC. "Et en plus de cela, il faut garder les animaux à la ferme, les nourrir et s’en occuper, ce qui est normal, mais cela va entraîner des coûts supplémentaires."

La dermatose nodulaire n’est pas prise à la légère par le secteur. 2.000 bêtes ont déjà dû être abattues. Cette maladie, qui n’affecte que les bovins, provoque de fortes fièvres, des défauts de lactation, de nombreux nodules (petites bosses) sur la peau et peut, dans certains cas, entraîner la mort. Sa transmission s’effectue principalement par les mouvements d’animaux infectés.

L'invitée du Morning : Manon Pisani - 20/10
L'invitée du Morning : Manon Pisani - 20/10
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D'abord recensée en Savoie et Haute-Savoie, épicentre de la maladie, les foyers se sont multipliés "probablement" à cause de mouvements "illicites" d'animaux, alors que des restrictions étaient déjà en place, précise un communique du ministère de l'Agriculture.

La nouvelle ministre du secteur, Annie Genevard, choisi de durcir les mesures en interdisant toute exportation pendant quinze jours, y compris dans les zones non touchées.

"Sur le fond, je comprends que nous devions rapidement endiguer la maladie pour éviter qu'elle ne se propage sur l'ensemble du territoire français", souligne Manon Pisani. "Mais les exports d'animaux ne sont pas à mon sens un facteur de propagation de la maladie."

La vaccination massive réclamée

Mais concrètement, quelles sont les autres mesures susceptibles d’endiguer cette épidémie? "La solution repose dans le respect strict du premier protocole mis en place", avance Manon Pisani. "C'est à dire une vaccination massive des animaux dans les zones autour des foyers. Il faut également stopper le mouvement des animaux (entres les régions françaises) pour venir à bout de cette maladie." Le gouvernement a annoncé avoir commandé jusqu'ici 800.000 vaccins pour les 15,7 millions d'animaux présents sur le territoire.

L'interdiction d'exportation est "une goutte supplémentaire se rajoutant à toutes les promesses non tenues", conclut l'éleveuse qui n'écarte pas la possibilité d'actions dans les prochaines semaines.

Vincent Chevalier avec TC