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"C'est un grand business": le combat de Romain contre une entreprise qui veut déterrer ses ancêtres

Une entreprise mandatée par la municipalité d'un petit village menace Romain de déterrer ses ancêtres s'il ne s'occupe pas de leur tombe. Il assure pourtant en prendre soin et avoir accepté plusieurs demandes d'entretien de la mairie, estimant que celle-ci lui demande toujours plus pour le pousser à abandonner.

Romain vit dans la région de Lyon, mais c’est à Saint-Léger-du-Bois, dans la Saône-et-Loire, que sont enterrés ses arrières, arrières, arrières grands-parents et deux autres générations de sa famille. L’entretien de cette tombe lui tient à cœur. Régulièrement, il la nettoie et y dépose des fleurs. 

Tout se passe bien jusqu’en 2019, où il découvre un procès-verbal collé à même la pierre tombale. Le document indique que sa tombe familiale est considérée à l’abandon. Il doit se manifester, nettoyer la stèle, sinon la tombe supprimée. Romain s'empresse alors de contacter la mairie. Mais depuis, la liste des conditions de la commune s’allonge.

"J'ai fait un certain nombre de travaux en 2014 sur demande de la mairie, j'étais d'accord pour les refaire en 2018 puis pour prendre une concession comme demandé. A chaque fois que je dis oui, on me demande des choses supplémentaires. Il faut que change la pierre tombale ou la rehausser, c'est très compliqué", raconte-t-il à RMC.

"Il y a une volonté manifeste de décourager et de me faire engager des frais encore plus important pour que je renonce", assure Romain.

La commune refuse un premier devis

Mais alors pourquoi Romain ne peut pas garder cette tombe? D’abord parce qu’il n’a pas de concession. Et pour cause, à l’époque où ses ancêtres ont été enterrés, ça n’existait pas.

Une concession, c’est l’emplacement qu’on achète pour une certaine durée dans un cimetière pour enterrer nos morts. Dans ce cas, pour que Romain puisse l’obtenir, il doit faire des travaux supplémentaires. Il a envoyé un devis à hauteur de 400 euros pour le nettoyage de la tombe. Devis refusé par la commune qui estime qu'il faut aller encore plus loin.

La mairie a-t-elle le droit de reprendre une tombe comme ça ?

C’est une procédure très encadrée par le code des collectivités territoriales. Une mairie peut déclarer une tombe à l’abandon lorsqu'il n’y a pas ou plus de concession, par exemple. Dans ce cas-là, elle doit laisser un peu plus de 3 ans à la famille des défunts pour se manifester. Si elle n’a pas de nouvelles, alors la mairie peut tout à fait exhumer la sépulture et récupérer la place.

A Saint-Léger du Bois c’est une entreprise spécialisée qui s’en charge. Oui oui, ça existe une société qui fait du tri dans les cimetières. Elle s’appelle Ad Vitam du groupe Finalys, et a été missionnée par la mairie. Sur 300 tombes, environ 70 devraient être récupérées par la commune d’ici la fin de l’année. Celle de la famille de Romain en fait partie, malgré toute sa bonne volonté.

"Je trouve choquant d'aller supprimer des tombes avec des personnes enterrées certes de façon très ancienne mais dont les familles se sont manifestées. Comment cela fonctionne au niveau de cette entreprise, je ne sais pas si c'est au nombre de tombes supprimées mais en tout cas c'est devenu un grand business. Ça montre l'état d'esprit du monde actuel", déplore-t-il.

Trois mois avant l'exhumation

Ad Vitam lui laisse trois mois avant d’exhumer la sépulture. Si d’ici là, Romain fait tous les travaux demandés, la société l’a promis à RMC, il pourra bien récupérer la tombe et payer pour une concession. 

Romain va y réfléchir. Mais il envisage déjà de saisir le tribunal administratif pour contester toute la procédure qu’il juge abusive.

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Joanna Chabas, Amélie Rosique et Elise Denjean