"Du harcèlement moral': Delphine Batho se réjouit de l'interdiction du démarchage téléphonique

Le démarchage téléphonique non consenti, c'est bientôt fini. Les sénateurs ont définitivement adopté mercredi à l'unanimité une proposition de loi contre les "fraudes aux aides publiques", qui permet de lutter contre les appels intempestifs. Une bonne nouvelle pour les 97% de Français qui se disent agacés par ces appels, selon un sondage de l’UFC-Que Choisir datant d'octobre 2024. On en reçoit aujourd'hui en moyenne 6 par semaine.
Jusqu'alors, on considérait par principe que les gens étaient d’accord pour être démarchés. Désormais, pour qu’une entreprise vous démarche, il faudra qu’elle ait votre accord explicite au préalable ou alors qu’elle ait un contrat en cours avec vous, et uniquement s’il s'agit d’une offre pour le même produit.
Le système est désormais inversé
Pour Delphine Batho, députée écologiste des Deux-Sèvres qui a participé au vote de cette loi, c'est désormais "l'inverse du système actuel". Celui qui était en vigueur est que "si on ne voulait pas être démarchés, on était censés s’inscrire sur Bloctel et on n’était censé ne plus recevoir d’appels".
"Mais ça n’a jamais fonctionné. C'est un combat depuis des années que nous menons avec des associations de consommateurs, comme l’UFC-Que choisir pour inverser le principe", explique-t-elle sur RMC.
Dans cette nouvelle loi qui vient d'être votée, après de longs aller-retours dans les deux chambres du Parlement, "tout démarchage téléphonique est illégal si vous n'avez pas dit expressément que vous êtes d'accord". Ce sera à l'entreprise de prouver que le consommateur a exprimé clairement son accord pour être démarché par téléphone.
"C'est enfin une bonne nouvelle. C'est du harcèlement moral", se réjouit-elle.
Entrée en vigueur en 2026
La mesure avait été adoptée au Sénat dès novembre à l'initiative du sénateur Horizons Pierre-Jean Verzelen, puis dans un texte dédié repris à l'Assemblée nationale en mars. Elle arrive finalement au bout de son parcours législatif via son introduction, par un amendement de la députée écologiste Delphine Batho, dans ce texte plus vaste, soutenu par le gouvernement.
Cette loi doit donc entrer en vigueur le 11 août 2026. Pourquoi si tard? “Je le regrette, j'avais un amendement pour que cela rentre en vigueur plus rapidement", déplore Delphine Batho.
"C'est le contrat en cours avec l'opérateur Bloctel qui expire en août 2026 et je pense que l'État a voulu éviter d’avoir à payer des indemnités de dédit”, détaille la députée au micro d'Apolline Matin.
Une bataille qui prend, en tout cas, fin après "7 ans" pour elle. Mais il aura fallu du temps au gouvernement pour s'emparer du sujet: "Vu de ma fenêtre d’élue d’un territoire rural, où on est concernés depuis des années sur les téléphones fixes, avec une exaspération en particulier des retraités et personnes âgées".
"Il a fallu attendre que tout le monde soit concerné et que ça envahisse les téléphones portables pour qu'enfin on arrête d'être bloqué à l'Assemblée. On n'écoute pas assez la ruralité", s'indigne-t-elle.
Il y a même eu "plusieurs lois" qui ont "refusé l'interdiction du démarchage", explique Delphine Batho.
Perte d'emploi
La Fédération de la vente directe craint, elle, que le dispositif menace des milliers d’emplois, notamment dans des régions où il est déjà difficile de trouver du travail. La députée répond: "mon vœu c'est que tous ces emplois soient redéployés par les entreprises dans la relation avec les clients".
"‘Faites le 1, le 2, le 3’, c’est insupportable. Et je pense que beaucoup d’entreprises pâtissent en termes d’images de l’absence d’un accueil humain, d’une possibilité de discuter avec un humain quand on a un problème", propose-t-elle.
Certains secteurs comme la vieillesse ou les travaux d’adaptation des logements au handicap sont totalement interdits de démarchage. Si une entreprise vous démarche quand même, il est possible de la signaler via un site dédié. Il suffira de donner l’heure de l’appel, son objet et le numéro de téléphone. Les entreprises risquent jusqu’à 500.000 euros d’amende et cinq ans de prison.