"Il n’y a que ça qui donne du travail": le témoignage de deux dealers de Marseille

Trois jours après les fusillades mortelles à Marseille, les habitants sont toujours le choc. Trois personnes sont mortes, dont un mineur de 16 ans, et huit autres ont été blessées dans la nuit de dimanche à lundi. Une compagnie de CRS 8, spécialisée dans les violences urbaines, a été déployée depuis mardi dans la ville.
Une ville meurtrie par les règlements de compte à répétition liés au trafic de drogue, qui ont fait 14 morts depuis le début de l’année. RMC a pu rencontrer deux jeunes qui ont été pris dans cet engrenage. À peine sorti de l’enfance, l’un d’eux a commencé à dealer.
“La première fois de ma vie que j’ai dealé, je devais avoir 13 ans. De base, c’était comme ça, pour un délire pour pouvoir m’acheter des habits, pour déguster un peu. Et après, tu tombes dans le piège”, indique-t-il.
Un piège dont il n’arrive pas à se sortir malgré ses tentatives de reprendre sa vie en main. “J’ai essayé d’arrêter plusieurs fois, mais je n’ai pas réussi. Je me suis retrouvé à retourner au même point pendant un mois ou deux. Après le chômage, je retournais au réseau parce qu’il n’y a que ça qui te donne du travail”, appuie-t-il.
Pourtant, ce travail n’a rien d’anodin et lui a même déjà coûté très cher. “Je suis rentré deux fois en prison, je me suis fait tirer dessus. En fait, réellement, j’ai peur, mais bon en même temps je m’en fous. Je marche seul, tous mes collègues sont morts en deux, trois ans”, explique-t-il.
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Une violence accrue
Selon lui, ces dernières années, la violence a augmenté. “Avant, ce n’était pas comme ça. Maintenant, les petits, ils ont 13-14 ans, ils ne savent pas ce qu’ils font. Moi heureusement, je suis un peu plus grand, mais si j’étais dans cette génération de petits de 15-16 ans qui vendent, qui guettent, je serais mort. Ils ne savent même pas pour qui ils travaillent”, assure-t-il.
Son collègue, Biggie (25 ans) essaie lui de s’extraire de ce cercle vicieux.
“Je suis chauffeur poids lourd. Je suis sorti de là parce que j’ai vu que le travail, c’était mieux. En fait, je n'ai pas envie de mourir jeune, donc je vais aller travailler, c’est mieux”, appuie-t-il.
Mais pour vraiment quitter le réseau, une seule solution. “Moi, j’espère partir de cette ville. Je ne veux plus entendre parler de cette ville, à part l’été pour aller à la mer”, rêve-t-il.
La mer, qui semble à la fois si proche et si lointaine depuis les tours des cités phocéennes.